"Bien mal acquis ne profite jamais !" C'est la maîtresse d'école qui l'a dit !


Il n'y avait pas dans toute la ville de Vivejoie-la-Grande de petit garçon plus gentil que Benoît Brisefer. D'une politesse exemplaire... Aimant les fleurs et les animaux... Studieux et appliqué... Bref, c'est un petit garçon comme bien d'autres... Avec, cependant, une grosse différence... Benoît est fort !... Terriblement fort !




J'aurais mieux fait d'attraper un rhume.



En 1960, alors que le continent américain était déjà inondé depuis près de trois décennies par l'arrivée de super-héros emblématiques et invincibles tels que Superman, Batman, Captain America et Wonder Woman, un événement inhabituel se produisit à près de 7000 kilomètres de là, sur le continent européen, plus précisément en Belgique. C'est là qu'un auteur belge francophone de bande dessinée du nom de Pierre Culliford, alias "Peyo", se lance dans ce genre, même s'il n'était à l'origine pas du tout fan des comics. Le résultat de cette tentative fut le premier tome des aventures de Benoît Brisefer, intitulé "Les Taxis Rouges". La première des quatorze aventures super-héroïques mettant en scène le petit Benoît démarre dans le numéro 1183 du journal Spirou. Benoît était le personnage négligé de Peyo, car malgré la publication de neuf albums dans les années 1960 et 1970, il fut éclipsé par l'énorme succès de la franchise des Schtroumpfs, à laquelle Peyo décida de se consacrer entièrement, laissant ainsi le pauvre Benoît en suspens. Il aura fallu attendre le décès de son créateur pour que Benoît reprenne vie, grâce à ses enfants qui créèrent six albums supplémentaires pour perpétuer son histoire et son héritage. C'est une histoire poignante, celle d'un enfant qui a finalement évolué au-delà de son créateur, trouvant son propre chemin avec le soutien des descendants de ce dernier, une transmission d'enfant à enfant empreinte de profondeur et de sens.


Dès la première vignette, nous plongeons dans l'atypique bourgade provinciale de Vivejoie-la-Grande, la Métropole de Benoît Brisefer, un endroit pittoresque où la puissance physique écrasante de Benoît est immédiatement mise en avant. Benoît Brisefer s'érige comme une version enfantine, comique et innocente de Superman, allant jusqu'à adopter son schéma de couleurs emblématique, jusqu'à partager une singularité autour d'une vulnérabilité contrastant avec son invincibilité : une faiblesse bien à lui, son talon d'Achille, qui le prive de sa force surhumaine lorsqu'il est atteint d'un simple rhume, sa propre "kryptonite". Bien que le portrait de Benoît puisse sembler être une simple caricature de l'Homme d'Acier, il va bien au-delà de cette impression superficielle. Il se présente comme un enfant d'une dizaine d'années, arborant une politesse exemplaire et délaissant toute prétention charismatique. Il cultive un amour pour la nature, les fleurs et les animaux, ce qui renforce sa sensibilité émotionnelle, le distinguant nettement du stéréotype du super-héros endurci. Cette sensibilité l'expose parfois à sa propre force incontrôlable, une maladresse qui le condamne à l'isolement puisqu'il ne parvient pas à trouver d'amis de son âge, laissant ainsi sa vie marquée par la solitude.


De ce récit émerge un jeune personnage des plus attachants, dont le suivi procure un plaisir indéniable. L'histoire est légère, dénuée de prétention, mais elle est portée par une ambiance bienveillante qui suscite un sourire constant. Elle nous entraîne à la découverte des mystères entourant les taxis rouges, offrant un périple riche en rebondissements qui maintient notre intérêt tout au long du récit. Bien que l'histoire conserve une touche d'innocence enfantine, elle parvient à captiver par sa capacité à divertir. Certains moments sont empreints d'humour, d'autres sont palpitants, et on y trouve des instants de joie authentique, comme lors de la poursuite nocturne dans le square, la course effrénée pour revenir à temps d'une île perdue des Galapagos à Vivejoie-la-Grande, ou encore lors de la confrontation finale avec les taxis. On prend également plaisir à observer une scène amusante où l'inspecteur blâme le comportement des jeunes tout en accusant les petits journaux illustrés d'influencer négativement leur conduite. Puis, notre sourire ne connaît pas de limite lorsque nous les surprenons en train de se précipiter avec un sourire aux lèvres vers un exemplaire du journal Spirou dès qu'il se retrouve seul dans son bureau.


En plus du courageux et aventureux Benoît, nous faisons la connaissance du sympathique et moustachu Monsieur Dussiflard, son unique ami malgré leur grande différence d'âge. Ce vétéran des taxis, qui conduitson un vieux tacot, devient un élément central de l'intrigue, avec le soutien indéfectible de son jeune ami. L'antagoniste principal, Monsieur Poilonez, à la tête de sa firme ultramoderne de taxis, m'a également procuré beaucoup de plaisir. Malgré son comportement dépourvu de caractère et ses traits stéréotypés, il incarne un mafieux comique, entouré de sa bande de bras cassés. Arsène Duval, un ex-financier ayant embrassé une existence de Robinson Crusoé sur une île isolée et idyllique, a également égayé mon expérience. Il présente une juxtaposition amusante à l'abondance matérielle de Poilonez, en vantant les vertus d'une société libérée des enveloppes matérielles, financières et de tout dogmes touchant le monde du travail. En ce qui concerne l'aspect visuel, Peyo propose une expérience plutôt modeste qui souffre du manque d'un coup de crayon extraordinaire pour réellement captiver l'œil, mais qui demeure tout de même une expérience relativement agréable. Il est à noter qu'il a pu bénéficier du concours de Willy Maltaite, alias Will, qui a pris en charge les décors, donnant un résultat également jugé de manière mitigée.



CONCLUSION :



Benoît Brisefer : Les Taxis Rouges, offre une expérience divertissante grâce à la création du personnage principal, Benoît, qui combine habilement l'héroïsme et la vulnérabilité. L'histoire légère mais engageante nous plonge dans une aventure parsemée de moments humoristiques et de rebondissements. Peyo, bien que dépourvu d'un style graphique exceptionnel, réussit à capturer l'essence de l'histoire avec un visuel simple mais efficace. Un album qui sait jouer avec les codes des super-héros tout en apportant sa propre touche d'originalité, faisant de cette lecture une expérience plaisante pour les amateurs de bande dessinée de tous âges.


Un premier album agréable.



Non, croyez-moi, ce n'est pas toujours drôle... Etre doté d'une force aussi extraordinaire... Benoît est toujours seul. Ce n'est pourtant pas sa faute, s'il est un peu maladroit...


B_Jérémy
7
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le 29 sept. 2023

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