17 filles par LioDeBerjeucue
Vraiment je ne sais pas trop quoi en penser.
J'aimerais essayer de ne pas tomber dans le travers des adultes et des contributeurs de Sens Critique qui jugent sévèrement le droit de ces filles à disposer de leur corps (à toutes fins utiles : on ne peut pas forcer une mineure à avorter contre son gré) et qui les traitent copieusement d'idiotes d'écervelées, de greluches, de salopes, et de pouf.
Rappel : ce sont des ados. elles testent des trucs, elles se construisent, elles ont besoin d'une tribu, elles prennent de mauvaises décisions, leur cerveau est encore en construction, ça déborde d'émotions contradictoires là dedans et ça n'aide pas à réfléchir ni à se projeter dans le futur comme un adulte pourrait le faire.
Ca m'a évidemment touché de façon personnelle, puisque ma mère est tombée enceinte à 17 ans certes parce qu'elle était amoureuse de mon père, qu'il avait une situation convenable, mais aussi pour se barrer de son village pourri, parce qu'elle n'avait plus très envie d'aller à l'école et parce qu'avoir un bébé tout mignon lui donnerait un truc à faire.
Dans son cas comme dans celui de ses jeunes filles, avoir un enfant apporte une sorte de respectabilité, un statut, que tu n'as pas en tant qu'adolescente, et mon dieu que le temps est long jusqu'à l'indépendance, si on peut prendre un raccourci de 9 mois, quitter l'autorité parentale et toucher le RSA, autant en profiter.
C'est marrant comme personne n'a traité le personnage d'Ellen Page dans Juno de salope, d'écervelée et d'idiote. Pourtant le message ce ce film est assez malsain en ce qui concerne l'avortement, Juno décide de ne pas avorter après avoir croisé une jeune militante pro vie qui lui explique que son bébé a déjà des ongles, et choisi finalement de le faire adopter. Bah ouais, tomber enceinte c'est pas grave, bon alors ça fait mal d'accoucher et on pleure un peu quand même mais on peut faire adopter le bébé après et reprendre sa vie d'ado comme si de rien n'était.
On pourra reprocher à 17 filles de ne faire qu'effleurer le sujet de l'après et de ne pas évoquer ce que feront les jeunes mamans de leurs vies : "On a eut 15 bébés et voilà." L'accouchement est agité comme une sorte d'épouvantail horrible pour empêcher les autres lycéennes de s'y risquer (tandis qu'au conseil de classe, on se prononce contre l'installation d'un distributeur de capotes, tout à fait logique). Selon moi il n'est pas nécessaire de montrer la vie après la grossesse. On a beau essayer de ne pas les juger, on sait tous ce qui va arriver, et les filles aussi, malgré leurs rêves utopiques. Les plus matures vont essayer de poursuivre leurs études, les autres iront grossir les rangs des familles monoparentales précaires.
Je ne cautionne pas, hein, j'essaie juste de me mettre à leur place.
En vérité je suis consternée par le fait que le seul moyen que ces filles aient trouvé pour se rebeller contre la société de leurs parents soit de tomber enceinte à 16 ans.
Même si le fait divers qui a inspiré le film s'est déroulé aux Etats Unis, ça en dit long sur l'espoir en avenir de la génération Y. Ou alors j'ai rien compris et c'est un grand cri d'espoir et d'amour envers l'humanité, une certitude dure comme fer qu'elles sont capables de mieux se démmerder. Sauf que la fin montre que non.
En tout cas c'est un film qui ne laisse pas indifférent, la forme est plutôt inégale, malgré des actrices solaires et très bien dirigées.