Télé-zobbies
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le 18 juin 2025
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Danny (Boyle) et Alex (Garland) — duo magique du cinéma britannique du début des années 2000 — remettent le couvert.
Et disons-le franchement : leur retour, tant attendu, part dans tous les sens.
Alors, on comprend assez vite le projet : détourner le film de zombies pour en faire une fable morale sur l’humanité, ses dérives, et la frontière poreuse entre monstres et humains.
Classique (re-voir tout Romero), mais ambitieux.
Toute une partie du film repose là-dessus. D'un côté, des zombies s'humanisant :
les « rampes-lent » laborieux, souffrant, implorant quasiment à l'aide ;
le mâle alpha doté d’émotions (enfin, censé l’être)…
la femelle zombie enceinte qui accouche d’un bébé sein ;
Face à eux, des humains détestables :
le prêtre anglican, en transe, heureux que le Jugement dernier soit enfin arrivé et abandonnant son fils à son sort (intro) ;
le père adultère abandonnant sa femme malade (trame) ;
le même, patriarche militariste qui pousse le jeune Spike traumatisé à exécuter un contaminé ;
le décérébré Erik qui ne pense qu'à la batterie de son téléphone et au réseau absence (et qui fait un passage-éclair) ;
et ces rituels qui glorifient la violence comme ciment de la communauté.
Symbole de cette volonté de “réconciliation”, le docteur Kelson incarnant le lien entre ces deux mondes. Banni des humains, réfugié parmi les morts-vivants, il s’échine depuis treize ans à ériger un sanctuaire où reposent indistinctement cranes humains et zombies.
L’idée, sur le papier, n’est pas inintéressante — mais à l’écran, c’est un pur délire.
Boyle et Garland en font une sorte de messie post-apocalyptique, enduit de teinture d’iode — cette substance rouge orangée censée à la fois le protéger du virus et repousser les infectés.
Le résultat ? Une série de scènes hallucinées, à mi-chemin entre le rituel mystique et le clip expérimental sur le deuil.
Complètement barré, il faut bien le dire.
Le problème, parce qu'il y en a un (et qu'il est gros), c’est qu’on reste dans un putain de film de zombies !!
Des contaminés aux corps disloqués, convulsifs, mus par une rage animale avec des yeux injectés de sang, qui vomissent des geysers purulents avant de te foncer dessus pour te bouffer la gorge et te contaminer à ton tour !
On ajoute, dans ce 28 Years Later, une nouvelle caste de zombies : des alphas surpuissants, bodybuildés, avec un appétit — et une anatomie — XXL. Des monstres qui t’arrachent littéralement la tête et la colonne vertébrale pour en faire des trophées.
Bref, du gore, du viscéral, du lourd !
Alors oui, tenter, au milieu de ce gros gros bordel, de nous faire avaler que les zombies ne sont peut-être pas si méchants, et qu’au fond, le vrai monstre sommeille en chacun de nous, relève du suicide narratif.
Evidemment ça commence à se casser la gueule dès qu'on met tout en place pour éviter la confrontation.
Quand on transforme nos héros en gentils baladins marchant gaiement au beau milieu des champs (alors que 15minutes plus tôt ils sont font dégommer parce qu'à découvert), quand ils se transforment en sage-femme pour zombie, ou encore, quand ils refusent d'abattre un zombie alpha sous prétexte d'une longue cohabitation pacifique… le film s’effondre, arrivant aux limites du ridicule, pris à revers par son propre message.
Boyle et Garland veulent réenchanter le mythe du zombie à coups d’inclusivité et d’humanisme.
Mais à force de vouloir réhabiliter les monstres, ils en oublient que ce qui faisait la force du genre, c’était précisément de les craindre (re-voir tout Romero).
Ultime frustration : les vingt premières minutes sont franchement géniales.
Les humains y affrontent (classiquement) des hordes de zombies affamés.
Tout y est : tension nerveuse, montage sec, urgence palpable.
On est cloués au siège. On aime. Du cinéma, du vrai.
Peu de personnages, pas de gras, juste l’essentiel : la peur, la fuite, la survie.
Et puis, le film switch.
Les contaminés deviennent soudain des allégories de reconnaissance sociale.
La peur et l’instinct brut se changent en séminaire sur la tolérance et la coexistence.
Des personnages improbables (et franchement inutiles) déboulent de nulle part pour alimenter ce récit de plus en plus foireux.
La trame s’étiole, Boyle et Garland s’égarent...
On comprend bien l’intention : détourner le film de zombies à 180°, lui greffer un discours politique fort, militant.
Mais le fossé est trop grand, et le message finit par virer à l’absurde.
Pour finir, les cinq dernières minutes power rangersques achèvent de tout flinguer.
Un final bariolé, grotesque, qui laisse craindre le pire pour la suite de la trilogie.
Triste épilogue pour un retour qu’on espérait triomphal.
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il y a 1 jour
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