Depuis que leur mère est morte, la joie a quitté la famille Stahlbaum, qui s’apprête à passer un Noël bien triste… C’est sans compter sur le cadeau posthume que la défunte fait à sa fille Clara (Mackenzie Foy), un mécanisme complexe qui ne peut s’ouvrir qu’avec une clé. Ayant consulté son parrain (Morgan Freeman), qui a conçu l’objet, Clara est propulsée par ce dernier dans un monde merveilleux où les jouets prennent vie et où est cachée la clé. Mais Clara va découvrir que les royaumes de ce monde fantastique comptent tous sur elle pour les défaire de la terrible menace que Mère Gingembre (Helen Mirren) fait peser sur eux…


Dès le fabuleux plan-séquence d'ouverture du film, une chose est sûre : on se trouve face à un film qui va nous en mettre plein les yeux. Et on ne se trompe pas. Il apparaît en effet quasiment impossible de résister à la somptueuse photographie de Linus Sandgren, celui-là même qui nous avait offert cette pépite visuelle qu’était La La Land, qui nous promène avec une aisance remarquable dans des décors d’une richesse étonnante signés Lisa Chugg. Sans oublier des costumes absolument magnifiques, réalisés par Jenny Beavan, qui connaît son métier, pour avoir travaillé avec des réalisateurs aussi intéressants et variés tels que James Ivory (Les Vestiges du jour), Tom Hooper (Le Discours d'un roi), George Miller (Mad Max : Fury Road) ou Gore Verbinski (A Cure for life).
Rapidement, on comprend qu’il y aura deux profils de spectateurs : ceux qui acceptent de se laisser embarquer dans l’odyssée visuelle étonnante que nous propose Casse-Noisette et les quatre royaumes, et ceux qui restent sur le carreau. On peut certes comprendre ces derniers, tant le voyage auquel nous convie Lasse Hallström s’avère d’un kitsch que d’aucuns pourront juger étouffant. Pourtant, à l’inverse de l’insipidité visuelle qu’était Un Raccourci dans le temps de sinistre mémoire, ici, le kitsch ne détruit pas le film, bien au contraire.


Par ses plans surchargés, regorgeant de détails et de trouvailles visuelles en tous sens, Casse-Noisette fait penser à une sorte d’application de l'art baroque au cinéma, dans la lignée de leur version en images réelles de La Belle et la Bête. On ne pourra en tous cas dénier au film d’Hallström et Johnston (réalisateur des reshoots du film, dont l’influence sur le résultat final aurait été telle qu’Hallström a eu l’élégance de le créditer au générique en tant que coréalisateur) une véritable ampleur visuelle, due à des effets spéciaux incroyablement réussis, auxquels on nous permettra de penser que Joe Johnston, spécialiste dans ce domaine, n’est pas étranger.
Ainsi, par la grâce d’effets numériques parfaitement utilisés, le monde bigarré d’Hoffmann prend vie sous nos yeux émerveillés, en tous cas, sous ceux des spectateurs prêts à renouer avec leur âme d’enfant pendant 1h30. Car c’est une véritable fontaine de jouvence que constitue ce Casse-Noisette, et l’on ouvrira les yeux aussi grands que les plus jeunes face à ce déluge d’images enchanteresses à l’atmosphère envoûtante.
Inattaquable sur le plan visuel, le film de Hallström et Johnston l’est également sur le plan sonore, et c’est avec un plaisir sans bornes que l’on entendra la musique du célèbre ballet de Tchaïkovski se mêler aux harmonies de James Newton Howard pour créer une bande-originale d’exception, véritable orgie auditive aux oreilles de tout amoureux de la musique, d’autant plus que cette musique prend vie sous les doigts de Lang Lang et la baguette de Gustavo Dudamel.


Il aurait malheureusement été trop beau que Casse-Noisette et les quatre royaumes fut inattaquable sur tous les plans, et l’on aura malheureusement plus de mal à le défendre – ou en tous cas, à le défendre intégralement – au niveau du scénario. De fait, si le scénario d’Ashleigh Powell tient globalement la route, il s’avère beaucoup trop superficiel par rapport à son sujet, malgré un sous-texte intéressant et bien employé sur la transmission mère-fille et sur l'héritage familial.
L’on commencera par s’étonner du fait qu’un film se nommant Casse-Noisette et les quatre royaumes ne nous fasse jamais découvrir les quatre royaumes en question, ces derniers étant simplement mentionnés sans que jamais l’héroïne n’y fasse un tour… Cela n’est heureusement pas très grave, tant la magnificence de l’ensemble parvient à nous faire oublier que le voyage aurait pu être plus ample, mais déconcerte de prime abord, faisant prendre au film le risque de perdre une partie de ses spectateurs.
Dès lors, on se concentre davantage sur les personnages, et ce pour se rendre compte qu'ils manquent singulièrement de consistance. Si le couple principal Clara-Phillip passe assez bien, non par une écriture infaillible mais plutôt du fait d’un caractère suffisamment présent pour faire oublier un background presque inexistant, ce n’est pas le cas de l’antagoniste principal, que la quasi-absence de motivations et l’absence totale d’ambiguïté rende trop superficiel, malgré un retournement très intéressant en milieu de film, malheureusement trop prévisible et/ou mal exploité. Néanmoins, pour les spectateurs les plus positifs, cela ne gâche en rien un spectacle de trop bonne qualité pour que ces défauts méritent que l’on s’y arrête, tant cette version de Casse-Noisette s’avère d’une fraîcheur, d'une générosité et d’une légèreté qui, en plus d’en faire un superbe cadeau de Noël, en font une bulle d’air dans un cinéma contemporain devenu par trop étouffant et désincarné …

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le 29 nov. 2018

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Tonto

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