Ce qui frappe dès les premières minutes de Ex Machina, c'est ce jeu permanent avec les antithèses et les dichotomies. Faire un huis clos dans un complexe souterrain au coeur d'une somptueuse nature qui semble ne pas connaître de frontières n'est pas le moindre. Le film se vivra en effet comme en apnée, oppressé et avec un sentiment de claustrophobie dans des décors pourtant constitués de parois fumées ou transparentes qui devraient normalement élargir les espaces. Il en résultera une configuration labyrinthique des lieux où se développe l'intrigue. La transparence quasi clinique est quant à elle relayée par les points de vue souvent sollicités des caméras de surveillance, s'opposant au sentiment de mystère et de secret permanent qui règne au sein du complexe.


Puis Ava s'invite dans cette atmosphère étrange. Elle en est le prolongement. Son corps oscille entre transparence et parties pleines, féminité évidente et animation robotique. Ses attitudes sont dans un premier temps enfantines. Sa beauté étrange irradie. On s'étonne de penser à ce mot. Mais son visage est parfait et dans ses yeux semblent reposer des émotions humaines. Des émotions qu'elle suscitera et qui opposeront son créateur et l'employé qu'il a choisi pour tester l'étendue de son intelligence artificielle. Les relations entre les deux hommes se tendent, à l'image du climat, d'abord ensoleillé, qui peu à peu s'obscurcit. Comme leur humanité.


Puis par petites touches, le spectateur a l'impression que tout se dérègle, subtilement. Les personnages renversent leurs rôles et Ava n'y est pas étrangère. Le malaise ressenti au début du long métrage tire sa sève des manipulations et du renversement des perspectives de l'intrigue.


Acte de création artistique, programmation, apprentissage, imitation, éclosion de la conscience de soi et des sentiments qu'on éprouve, Ava est fascinante car elle est tout cela à la fois. Auscultant la classique question de l'avènement de l'intelligence artificielle, son évolution et sa place dans un monde terriblement humain, Ava se dresse au milieu du carrefour entre émotion robotique et intelligence humaine.


Behind_the_Mask, qui se demande ce qu'il y a sous sa peau.

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le 30 juin 2015

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