La Lune, je l’aime plus j’vous la laisse...

Titre faisant référence au morceau Au DD de PNL.


Hop, petite phrase au début pour prévenir que je spoile un peu le film…


Le Cinéma Français, en général n’est connu que pour ses comédies, ses drames et ses films sociaux. Et ça marche, donc pourquoi faire autrement quand on remplit aisément les salles ? Et pourtant, et on est tous d’accord là-dessus je pense, notre cinéma manque de diversité. Il fallait quelque chose de nouveau qui puisse relancer ce cinéma qui stagne depuis quelques années maintenant et qui empêche cette diversité, préférant la noyer sous le lot de films déjà vu… Le cinéma de genre n’arrive pas réellement à se faire sa place en France et les réalisateurs préfèrent même s’en aller aux Etats-Unis où ils seront plus libre et reconnus à leur juste valeur. Mais c’est là, en 2021, après des mois et des mois d’attente, sans cinéma, qu’il débarque et vient nous apporter notre dose de Science-Fiction et de nouveauté en nous disant que oui, c’est possible de proposer autre chose en France…


« Attention, je n'ai absolument rien contre la comédie à la française, le film d'auteur intimiste ou le film social. Mais il est bon parfois d'avoir la liberté de sortir des sentiers battus du cinéma hexagonal. Même s'il m'a fallu une rage de fou pour y parvenir.»


Et l’homme qui tient l’avenir de la Science-Fiction en France entre ses mains (j’exagère à peine) n’est autre que Romain Quirot. Un inconnu du grand public, mais qui est un habitué du genre. En témoigne son court-métrage se nommant : « Le Dernier Voyage de l’Enigmatique Paul W.R ». Un court-métrage qui a su faire parler de lui, en bien, atteignant même une place de finaliste pour les Oscars. C’est simple, comparé au film, mais ça fonctionne : les plans sont travaillés, les effets visuels ne sont pas mauvais, la musique est soignée et… on y croît tout simplement. Et surtout, on s’intéresse au personnage et le fait qu’il brise le quatrième mur y aide beaucoup. Bref, mission réussie pour Quirot, tellement qu’il a voulu en faire un long-métrage...


«Quand j'ai proposé de transformer ce court-métrage en long, les producteurs français m'ont regardé d'un drôle d'air. Lorsque c'est finalement devenu une réalité, je me suis rendu compte que je m'apprêtais à gravir une montagne infranchissable. Nombreux ont été ceux qui m'ont dit : «Ne faites pas un film de SF en France»


Ne faites pas un film de SF en France… C’est quand même triste d’arriver à faire ce constat. Et la nouvelle mission de Romain Quirot est de pouvoir faire comprendre à notre cinéma, que l’on peut faire de la SF sans devoir s’appeler Luc Besson. Il a tout donné et je salue son ambition et ses bonnes intentions mais…


«Je suis aussi sincère que possible dans Le Dernier voyage. J'ai tout mis. »


Mais, force est de constate que Le Dernier Voyage n’est pas une franche réussite. En effet, si les images de cet univers et plus particulièrement de cette Lune dans la bande-annonce étaient prometteuses, une fois en salle, une petite déception s’est très vite faite ressentir.


Alors par où commencer… Peut-être par le squelette de tout film : le scénario. Paul W.R., le meilleur astronaute et le seul à pouvoir sauver la Terre de sa destruction, refuse tout simplement cette mission, convaincu par ses idées, qui vont s’avérer fausses. Et il va finalement accepter et effectuer son Dernier Voyage. C’est un scénario qui peut tenir la route, s’il n’y avait pas un surplus d’éléments assez cliché et mauvais qui viennent entacher l’expérience. Le réalisateur a voulu faire de son court un long et pour ça il a rajouté des éléments dans l’intrigue qui sont soit inintéressants, soit tout simplement mauvais. De plus, le film ne dure qu’1h27, ce qui est, selon moi, bien trop court pour un film de cette trempe. L’univers n’est peut-être pas assez exploité. Mais nous pouvons comprendre cette durée par le manque cruel de budget. Voilà un des problèmes du film et c’était malheureusement prévisible. Certains plans sont réussis, notamment le premier qui commence, comme pour le court-métrage, avec un lézard pour ensuite introduire l’univers : la Tour Eiffel ensevelie dans le sable nous met directement dans le bain et ça fonctionne. On peut aussi penser à ce plan vers la fin du film, quand la fusée quitte la Terre ou encore à ce plan en noir et blanc, (d’ailleurs le noir et blanc n’est pas mauvais en général), quand Paul court et se fait foudroyer par un éclair rouge. Mais, malheureusement les effets visuels sont très inégaux. Je parlais de fusée et cette dernière n’est pas très bien faite, tout simplement, et ça se voit. Les plans dans les airs, aussi, lorsque les voitures s’envolent, sont largement perfectibles, à l’instar de cette Lune, qui peut parfois offrir quelques beaux plans, mais également tout l’inverse, notamment vers la fin. On peut également prendre comme exemple cette scène où nos personnages vont devoir traverser une tempête : et on pense machinalement à la même scène (mais avec du budget) dans Fury Road. Mais si on fait abstraction de cette comparaison, la scène n’en est pas moins décevante : en effet, on n’a droit qu’à des plans à l’intérieur des voitures, il n’y a pas vraiment de tension et les effets visuels n’aident pas à la rendre meilleure… Voilà, le film manque cruellement de budget. En témoigne, cette fin beaucoup trop accélérée, parce qu’ils n’avaient pas le choix. Et on se retrouve avec, comme dernier plan, une Lune qui s’éloigne beaucoup trop rapidement, tellement que ça en devient ridicule et je pèse mes mots. Aussi, comme dit précédemment, le film est bien trop court et on doit avoir un seul vrai combat dans le film : un combat qui oppose Paul à une sorte de policier, plutôt bien tourné, et ça m’avait surpris du coup, avec une bonne shaky-cam, mais la fin est tellement anecdotique : Paul est à terre, son ennemi prend bien son temps pour le viser mais lui tourne le dos lentement à cause d’une gamine et se fait avoir comme un bleu… C’est du déjà-vu et c’est mauvais tout simplement. Mais, un scénario peut être rattrapé par ses personnages. Et encore une fois, je trouve que c’est décevant. Le film essaye d’instaurer un passé aux personnages pour qu’on puisse s’attacher à eux, en vain… Ce n’est pas intéressant, certains dialogues entre eux sortent de nulle part et on ne croit pas à leur alchimie. En effet, les acteurs ne sont pas convaincants. Hugo Becker était meilleur dans le court-métrage, puisque son personnage était plus intéressant (on y reviendra), Lya Ouassadit-Lessert et Paul Hamy surjouent, selon moi et n’arrivent pas à donner de l’épaisseur à leur personnage qui était déjà inintéressant. Ce ne sont que des personnages fonctions qui sont là parce que sinon Paul parlerait tout seul et parce qu’il fallait un méchant et c’est tout. Et en parlant du méchant. Elliot W.R. est un mauvais antagoniste. Ce qui rend sa mort oubliable, d’ailleurs. Il manque de charisme, n’inspire à aucun moment la peur et ses excès de colère sont tout simplement ridicules et ne sont pas vraiment justifiés. Et de base, dans le court-métrage, c’était Paul qui avait le pouvoir de lire dans les pensées. Pourquoi avoir changé un élément aussi important ? Et pour finir avec les acteurs : Jean Reno. Un nom pareil, ça claque sur une affiche, mais franchement… Il m’a eu et paru humain pendant une seule scène du film et c’est tout. Pendant le reste du film, il se demande ce qu’il fait là et est constamment à côté du ton, c’est si décevant… Enfin, et je vais finir là-dessus, le film propose une bande-originale très intéressante pour le coup, on retrouve d’ailleurs un morceau de l’artiste Labrith, mais pour une scène qui ne sert à rien, c’est dommage. Mais sinon, la musique qui intervient lorsque Paul se décide à accomplir sa mission est très bonne, voire même épique avec ses cuivres qui viennent donner du punch au morceau. C’est une bande-originale assez éclectique, puisque l’on peut retrouver de la synthwave, plutôt prévisible pour ce genre de film et quand on voit la police du titre aussi, mais ce qui est moins prévisible sont les interventions d’artistes comme Françoise Hardy, Eddy Mitchell ou encore Barbara…


Le Dernier Voyage, de Romain Quirot est un projet très ambitieux, mais qui, malheureusement, n’a pas eu assez de moyens. Et c’est dommage. Comment convaincre le public en ne proposant pas une véritable expérience esthétique ? Et ce n’est pas du tout de la faute des réalisateurs… Il y a quelque chose à changer et ce film peut faire avancer les choses dans le bon sens. Donc, j’espère qu’il aura su intéresser un public, parce que j’ai vraiment envie d’en voir plus, mais avec plus de budget, plus de temps et de soins accordés au scénario pour libérer le plein potentiel de la SF française.


PS : les citations viennent d’une interview donnée au Figaro.

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le 24 oct. 2021

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