Gaspar no way
If I were as pleased with myself as Gaspar seems to be, I would write my text entirely in english, even if I only talk to french people, …and I would put black cuts between each line, so everyone...
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le 23 juil. 2015
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Gaspard Noé est un petit malin. Il a pris acte que le porno s’est banalisé, il réalise donc un porno en sachant très bien que toute personne qui choisirait de s’en émouvoir passerait pour une grenouille de bénitier. Et ça marche : au Masque et la Plume, aucun des quatre critiques ne s’est élevé contre la dimension porno du film. Le porno comme une chose banale, voilà l’un des éléments du politiquement correct d’aujourd’hui.
Il s’agit bien ici de pornographie, pas d’érotisme. L’érotisme suggère, le porno montre. L’érotisme, c’est Le genou de Claire. Le porno c’est Nymphomaniacs, et plus encore ce Love. Car là où Nymphomaniacs se montrait souvent ludique, allusif, brillant, le film de Noé n’apporte presque rien pour étayer ou contrebalancer ses scènes de sexe « non simulées ». Quelques aphorismes extraordinairement banals, voire niais, sur la vie ou sur l’amour. Et, reconnaissons-le, une certaine mélancolie distillée par cette voix off qui se noie dans le remords. Plutôt bien, ça.
Pour le reste, c’est une succession de scènes hard : masturbation, fellation, cunnilingus, triolisme, boîte échangiste... Ne manque que la sodomie. L’éjaculation faciale, ce sera pour le spectateur, en 3D c’est peut-être le plus amusant (je ne fais qu’imaginer car j’ai vu le film en 2D). Les scènes se succèdent. Au bout d’un moment, je me dis : « tiens, ça faisait longtemps ! »... et puis : « encore !... » et je finis par regarder ma montre. Lassant.
Notons aussi qu’il s’agit, comme presque toujours au cinéma, d’une vision très masculine de la sexualité : centrée sur le phallus, et faisant assez peu de cas du plaisir féminin - le mec qui vient dans les mains ou la bouche de la fille c’est bien, mais quid du plaisir de celle-ci ? Ce ne serait pas un peu frustrant pour elle ?...
Certes, le film annonce la couleur puisque le héros déclare en substance : « je ne suis qu’une bite ; une bite ne pense pas, elle ne veut que niquer ». Reste à savoir si suivre l’activité d’une bite pendant deux heures 18 (c’est à peu près ça, Love) va passionner le spectateur.
Le héros, apprenti cinéaste qu’on ne voit, soit dit en passant, jamais ni travailler ni étudier, déclare à un moment qu’il ambitionne de faire un film qui montre la sexualité associée à l’amour, ce qui « ne s’est jamais fait au cinéma » (ah bon ?).
On devine que c’est le projet de ce film... Passer par tous les clichés du porno, ce serait donc ça l’amour ? Prendre sa copine en levrette dans les chiottes d’une boîte de nuit face à un miroir ? Fréquenter une boîte échangiste ? Se faire faire un pompier dans un escalier ? Amour, ou fantasme valorisant la virilité du réalisateur ?
Est-ce que le signe d’une sexualité placée sous le signe de l’amour, ce ne serait pas précisément de se passer de tous ces artifices : sex toys, échangisme, positions ou lieux insolites ? Car lorsqu’on est habité par l’amour, tout se passe à l’intérieur. Et le phallus ne devient plus si essentiel. Ah, mais ce serait beaucoup moins intéressant ! C’est bien là le problème : la puissance de la relation sexuelle amoureuse ne peut pas être montrée, elle ne peut être que suggérée. Pas du tout le projet de Noé.
Entre le cul et le cul-cul, pas grand chose donc. Quelques belles scènes tout de même, où l’on voit que Noé n’est pas un charlatan en matière de cinéma : la première scène au resto avec la jeune fille blonde (j’aime bien le type noir en arrière-plan), une autre dans un bar avec une fresque bucolique en fond, la première scène de boîte de nuit (Noé a ici le bon goût de ne pas nous imposer le boum boum, de faire passer la musique en arrière plan), la scène d’engueulade dans le taxi. Quant aux scènes de porno, reconnaissons qu’elles sont fort bien captées, avec de magnifiques lumières et des angles parfois intéressants, ou un découpage créatif (la scène de triolisme par exemple). Et sur du Satie, c'est plus raffiné que sur du boum boum. D’où ce 6, tout de même. On a affaire à un vrai cinéaste. Qui a un style à lui (exemple, ces cuts avec des écrans noirs pour rythmer les plans... un procédé qui vire un peu au tic d’ailleurs). Et un vrai savoir-faire.
Mais qui, malheureusement, n’a rien à dire.
Créée
le 6 déc. 2018
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