Pâté en croupe
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le 22 mars 2018
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Premier volet du projet Mektoub is Mektoub ce chant numéro 1 permet encore une fois à Abdellatif Kechiche de nous livrer une fresque naturaliste proprement fascinante, d'une justesse dramatique peu ordinaire...
D'emblée les premières minutes brisent la glace de la pudibonderie avec une scène d'ébats d'une rare puissance érotique, loin du caractère parfois mécanique des séquences sexuellement explicites du chef d'oeuvre La Vie d'Adèle. Ici les corps sont sublimés comme jamais par la caméra du réalisateur, taillant littéralement "dans le chou du plan", à l'image de son mentor Maurice Pialat : fessiers charnus, giron gourmand, visage à l'ardeur plantureuse de la resplendissante Ophélie Bau... On boit les beautés kechichiennes comme on mangerait une plâtrée de pâtes en sauce, avec envie, appétence et redondance.
Mektoub My Love, fier et portant à bras le corps sa dimension vériste, est donc un nouveau bijou dramatique et dramaturgique. Peuplée de comédiens et de comédiennes tous plus brillants les uns que les autres cette saga estivale nous plonge au coeur des années 90, dans une série d'amourettes plus ou moins déçues, baignée par la lumière surexposée des littoraux de Sète. Nous sommes là dans du pur Kechiche : décor méridional évoquant celui de La Graine et le Mulet, langage des corps comme au temps de Vénus Noire ou encore jeux de marivaudage aberrants rappelant la violence des rapports amoureux de L'esquive... à tel point que le film tend parfois à devenir un objet à la fois remarquable de cohérence artistique et un brin auto-référencé. Fort heureusement c'est - comme toujours avec Abdel Kechiche - extraordinairement crédible dans chaque parcelle d'écriture et dans chaque situation proposée.
Fait pourtant nouveau et des plus audacieux : le cinéaste utilise pour la première fois le répertoire musical classique, nous offrant entre autres une scène de pur lyrisme montrant en temps réel une brebis mettant bas au son du Laudate Dominum de Mozart. Cette scène, en totale rupture avec l'ensemble du métrage d'ordinaire si douloureux, est un moment de beauté proche d'une aria paradisiaque... S'ensuivra une séquence interminable de soirée dansante, totalement hallucinatoire dans son rythme, sa durée et son aboutissement technique ( mixage hors-paire, photographie particulièrement chiadée ). Un très grand film, ni plus ni moins.
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le 22 mars 2018
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