Attaque ! par SimBoth

Attaque ! est clairement une œuvre contestataire et à charge vis-à-vis de l'armée. Robert Aldrich démontre sans compromis l'absurdité de l'institution et particulièrement les choix et les décisions de ceux qui la dirigent pendant la Seconde Guerre mondiale. La haute hiérarchie envoie à la mort les pauvres soldats sans jamais se salir les mains, soit à cause de leur lâcheté, soit parce qu'ils sont corrompus par des calculs politiques et par des intérêts personnels. C'est le cas du capitaine Cooney qui, par peur de l'affrontement, fait tout pour éviter d'aller à la bataille, malgré le désespoir du lieutenant Joe Costa et de ses hommes subissant les dégâts de son incompétence. Costa est un soldat exemplaire et courageux, malgré sa dureté, son nihilisme et son impétuosité, étant donné qu'il se sent responsable de son devoir de protéger ses troupes. Mais ils ne peuvent rien face à Cooney, parce que ce dernier est couvert par le colonel Bartlett et par sa place importante dans l'État civil. De ce fait, le spectateur se confronte à l'hypocrisie, aux magouilles et aux trahisons des marionnettistes, mais surtout à la mort des soldats de terrain plus intrépides. Brûlant et engagé, Attaque ! oppose ainsi l'héroïsme ordinaire de ceux qui vont vraiment sur le terrain à l'arrivisme d'une haute classe planquée, aussi dangereuse que l'ennemi allemand au front.

Pour les séquences de guerre, la vivacité et l'énergie violente de la mise en scène captent un monde sans pitié et en délabrement. Le cinéaste maintient une tension palpable et une attente éprouvante avant de lâcher les gonds dans une action sèche et frontale dont le réalisme âpre amplifie l'horreur. Tandis que pour les scènes plus verbales, son style baroque, ses lumières agressives et ses cadrages expressifs appuient la brutalité et la friction intense entre les personnages, rendant les échanges très psychanalytiques et cérébraux. Elles se déroulent quasiment en huis clos et mettent totalement à nu la noblesse d'âme et les angoisses de l'homme face à la guerre, donnant le sentiment d'être dans un no man's land moral. C'est donc un pur film d'affrontement très dépouillé, autant physique que psychique, et donc de rapports de force à la fois virils et corrosifs, toujours prêts à imploser.

L'œuvre contient une forme de rage au cœur et de hargne, puisqu'elle cherche toujours à dévoiler la vérité et la justice contre le manque d'intégrité de la hiérarchie qui prive du droit de conscience. D'ailleurs, les corps dans le long-métrage, même dans des espaces confinés, sont toujours dans une dynamique de mouvement pour éviter tout fatalisme. Malheureusement, cela est dérisoire chez Aldrich, car l'honnêteté mène au sacrifice et fait du héros un anonyme martyrisé, à l'image de Costa, dont il ne reste que l'image d'un mort au visage figé dans la douleur. Pourtant, dans le dernier plan, le lieutenant Woodruf décide de dire la vérité, après avoir tué de façon mérité Cooney et d'avoir entendu le chantage de Bartlett pour couvrir cela. Il veut dénoncer la gangrène immorale de cette institution, qui décèle le pire comme le meilleur de l'humain, et par conséquent, sa parole permet de garder espoir dans ce monde infernal.