Un grand final qui malgré quelques écueils est largement à la hauteur de ses ambitions.


La facilité principale du film est bien entendu l'inclusion du facteur voyage dans le temps dans l'équation, exercice ô combien casse-gueule et ce film ne déroge pas à la règle : on se sait trop si on parle du passé ou de réalités alternatives créées par chaque voyage.


A cet égard, la conclusion de l'arc narratif de Steve Rogers fait figure de cas d'école. Ses pérégrinations seront peut-être détaillées dans un autre média, mais ça aurait mérité plus de développement ; au moins quelques explications.


Toutefois, ce film faut autant office de conclusion à la "Saga de l'Infini(té ?)" que d'hommage à celle-ci ; il faut dire que c'est bien la moindre des choses, car malgré tous les défauts que l'on peut trouver à cette saga (entre autres un grand nombre de films qui individuellement sont tout juste moyens, formatés et aseptisés), elle reste dans l'ensemble une vraie prouesse narrative et industrielle.


La facilité du voyage dans le temps trouve alors une forme de justification, prétexte à un fan-service assumé et bienvenu.


C'était pour ma part un sentiment très étrange de replonger dans ces films que j'ai vus au cinéma à leur sortie par le biais d'Endgame. 2012 et 2014 semblent si proches et si lointaines à la fois... Je me suis surpris à avoir des réminiscences du contexte où je me trouvais à la sortie de ces chapitres. Assez inédit comme sensation devant un film tout frais.


Les Russo ont réitéré leur exploit, ce que Whedon n'avait jamais réussi à faire, de connecter et pas seulement contracter cet univers (ce que j'ai déjà dit dans ma critique d'Infinity War). Difficile d'imaginer deux films plus différents que Winter Soldier et les Gardiens de la Galaxie, mais de façon totalement décomplexée Endgame réussit à les lier entre eux et aux autres. Il faut dire que le recul apporté par l'humour est un ressort essentiel pour rendre l'absurde crédible. Surtout, le changement d'échelle des enjeux opéré au fil des années rend ce qui semblait incroyable il y a dix ans parfaitement naturel (ça et le fait que les héros s'entendent beaucoup plus facilement, là où dans le premier Avengers ils ont mis une bonne partie du film à accorder leurs violons - ce qui était d'ailleurs assez chiant, le drama ayant bouffé une bonne partie de ce premier opus). Et les films précédents encore plus anecdotiques qu'ils ne l'étaient, pour la plupart.


Concernant les personnages maintenant, Endgame est fidèle à l'esprit des trames précédemment établies, dans le bon mais aussi dans le mauvais. Liste non-exhaustive de mes impressions :



  • Stark ouvre le bal en se montrant comme toujours délicat et attentionné à sa manière avec les personnes abîmées par la vie. C'est quelque-chose qui est propre au personnage, même à ses débuts quand il était une caricature insupportable des pires travers de son interprète, ce qui ne lui est passé qu'à partir du (très moyen) Iron Man 3.


  • Thor continue à être extrêmement malmené, et au point où on en est ça ne me fait plus rien. J'ai déjà pu dire que le traitement de ce personnage est un énorme gâchis, dont l'apothéose à été atteinte avec Ragnarok. Le potentiel dramatique et tragique du personnage est énorme, et il a été dévoyé en personnage comique d'un ridicule rare. Ce qui semble être la conclusion de son arc narratif est d'ailleurs la plus débile du trio original.


  • Peter Quill n'est revenu sur Terre que pour en repartir aussitôt, mais il nous reste le dernier chapitre des Gardiens pour voir si ça peut être rattrapé (oui, le film aurait vraiment gagné à faire une demi-heure de plus).


  • Pour revenir sur Stark et sa rencontre avec son paternel, c'est une scène que j'avais fantasmée depuis longtemps, car Howard Stark est un personnage complexe qui n'a rien à voir entre 1945 et en 1970 (une des raisons du binôme d'acteurs d'ailleurs je suppose). Et j'aurais justement voulu ça avec le Howard de Dominic Cooper. Ca aurait été beaucoup plus intéressant et désopilant.
    On voit d'ailleurs le Jarvis de la série Agent Carter (qui comme toutes les autres séries Marvel, par son ton mine de rien assez violent, ses maladresses et son budget cheap, sans compter son annulation, n'est à mon sens pas raccord avec les films).


  • Captain Marvel ne sert pas à grand chose si ce n'est à jouer les deux ex machina. Il est bien pratique de la voir s'en aller au moment où Ant-Man réapparaît (personnage ici mieux exploité que dans ses deux propres films). Mais on comprend que le film aurait duré bien moins longtemps si elle était restée.
    Si j'ai bien compris, ses scènes ont été tournées avant son film éponyme, et le personnage n'était pas encore tout à fait cerné que ce soit par les auteurs ou l'interprète, ce qui la rend assez antipathique.



D'ailleurs, pour ce qui est du girl power eh bien... Le film respectait dans le cahier des charges. Il en faisait, mais pas trop, ce n'était ni subtil ni dérangeant. La Sorcière Rouge qui défonce Thanos au point qu'il demande un bombardement visait clairement à faire plaisir à une certaine catégorie de spectatrices, mais je ne m'en suis pas formalisé. Ça commençait pourtant à monter crescendo jusqu'au moment fatidique, LE moment le plus ridicule de cette saga (et pourtant il y en a eu un paquet depuis 2008) : le team-up absolument pas naturel dans le champ de la caméra d'à peu près toutes les nanas du MCU. Et pour bien faire plaisir au public visé on met Peter Parker en mode petite souris au milieu. Voilà, rien à ajouter là-dessus. Ça va faire rager les virilistes, mais ça va surtout blaser les gens qui viennent se divertir et pas voir une propagande. C'était tellement mal emmené, tellement grossier et forcé que ça m'a totalement sorti du film. Bref, je m'arrête là.


Pour conclure sur la narration du film, ne pas revoir tous ces personnages pendant un an a eu son petit effet, car j'ai vraiment eu l'impression de voir leurs fantômes revenir à la vie, même en sachant pertinemment en amont que ça allait arriver. Leur absence a en tous cas bien été mise en valeur, et l'émotion insufflée par leur retour était bien là.
Le saut de 5 ans dans le futur est comme pour le voyage dans le temps à la fois justifié et maladroit, mais ça risque également de compliquer la tâche pour la "crédibilité" des films et séries à venir - comment tout le monde reprendrait sa vie normalement dans de telles conditions ? Peter Parker semble pourtant bien retourner au lycée comme si de rien était...


Plus largement, avec les projets cinémas et séries Disney+ annoncés, il semblerait qu'on se dirige vers un certain nombre de prequels... On verra bien où ça nous mènera, mais ce sera apparemment les premières séries qu'on pourra vraiment qualifier de liées au MCU.


Une chose pour finir, cerise sur le gâteau pour moi : le MCU a au fil du temps utilisé de sacrés bons morceaux de musique (malgré des scores en général oubliables, ce qui est aussi le cas ici) et l'un d'eux était sorti du lot à mes yeux : It's Been a Long, Long Time de Kitty Kallen, dans Winter Soldier.
Ce fût donc un vrai plaisir de l'entendre clôturer cette fresque, avec ses accents d'adieux classy façon Hollywood d'antan. Une parfaite manière de saluer un grand spectacle luxueux et impressionnant, annonçant un repos des participants historiques après un défi, une lutte pour nous divertir en nous en mettant plein les mirettes, une cérémonie qui aura duré 11 ans.

Nevare

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