Tiré d’un roman de Shōtarō Ikenami, un auteur de fiction historique assez largement repris au cinéma et sur petit-écran (Les Derniers samouraïs, Baian l’assassin, etc.), maître des récits de samouraïs souvent sombres et désenchantés. Gosha signe une fresque spectaculaire de 2h40 (qui aurait pu allégrement être raccourcie de 30 minutes) cassant les codes du bushidō, mêlant des bandits et des samouraïs à peu près aussi pourris les uns que les autres, dans une ambiance de monde pourri et sombre. Ici pas de Robin des Bois ni de guerriers héroïques, mais des hommes prêts à toutes les bassesses pour parvenir à leurs fins : violence, trahison, affranchissement des règles. On est plus proche du machiavélisme d’un Sword of Doom (Okamato, 1966) ou de la dénonciation d’une caste de samouraïs corrompue (Kobayashi, Goyokin, Baby Cart) que du chanbara joyeux et triomphant.
Film annonciateur du grand retour du chanbara au cinéma (il sort la même année que le Samurai’s Shogun et Last of the Ako Clan de Fukasaku, les trois films étant suivis de plusieurs autres dans le même ton) autant qu'il formalise la sortie crépusculaire d'un genre qui a fait les beaux jours des studios dans les années 1950 dont on a fait le tour aujourd'hui.
Sur le plan formel le film fait preuve d’une grande maîtrise technique : cadrages, photographie, déplacements de caméras et malgré ses longueurs et son faux rythme laisse éclater des scènes d’action aussi soudaines que violentes. A noter également le casting de qualité : Tatsuya Nakadai en chef insaisissable des bandits, Tetsurō Tanba, Joe Shishido et pas mal d'anciens de la Toei comme Kunie Tanaka, Mikio Narita, Tatsuo Umemiya…
On compare souvent l'œuvre de Gosha à celle de Fukasaku qui entreprend un travail similaire à la même période. S'ils sont très proches sur le fond en ce qu'ils offrent une vision désenchantée des samouraïs, sur ce premier acte (Bandits [...] contre Samurai's Shogun) j'ai préféré le travail de Gosha qui propose un schéma narratif plus posé et des protagonistes moins caricaturaux, là où Fukasaku traite son sujet avec excès.