Je ne sais pas pourquoi, mais après les perles que nous avait servi Darren Aronofsky, dont notamment Pi, Requiem for a Dream, The Fountain et The Wrestler, j'avais du mal à imaginer son univers transposé dans celui des ballerines. Néanmoins je ne pouvais passer à côté, Aronofsky figurant parmi mes réalisateurs fétiches, et a fortiori le film ayant reçu 5 nominations aux Oscars 2011.
Le New York City Ballet s'apprête à donner une représentation du Lac des cygnes. Nina (Natalie Portman), jeune fille prude, est parfaite pour faire le cygne blanc, mais le metteur en scène, Thomas (Vincent Cassel), veut la voir devenir le cygne noir, son parfait alter-égo. Poussée par sa mère, une ancienne ballerine, et sous pression suite à l'arrivée de Lily (Mila Kunis), une adversaire attendant patiemment une faille pour pouvoir prendre sa place, Nina devra lever ses inhibitions pour pouvoir incarner à la perfection son rôle.
Ce qui était bien avec les précédents Aronofsky, c'est qu'ils avaient l'avantage d'être relativement imprévisibles, que ça soit dans leur déroulement ou leur approche. Black Swan prend en revanche le contrepied de ses prédécesseurs, ici on sait comment ça va finir dés le début, et si le réalisateur réussit à mettre en place un climat réussissant par moment à être angoissant, il ne fait que régurgiter quelque chose que lui et ses contemporains ont déjà ruminé des centaines de fois.
Pire encore, Aronofsky, déjà handicapé par un pitch commun, nous sert du Richard Kelly jusqu'à l'écoeurement, à coups d'effets de miroirs reflétant des illusions ainsi qu'une schizophrénie nous renvoyant en plein Donnie Darko. Aronofsky avait sa base, mais il n'a pas su comment la traiter, pour la simple et bonne raison qu'il l'en avait déjà fait le tour avec Pi.
Clint Mansell, qui avait pourtant déjà composé les bandes-originales de ses précédents films, nous sert ici quelque chose d'assez fade, sans être non plus indigeste. Ce qui en revanche l'est, indigeste, c'est de supporter Lac des cygnes passant en boucle pendant presque toute la durée du film, que ça soit par le biais de la boîte à musique de Nina, de son mobile ou des répétitions. Reste néanmoins quelques morceaux sympas composés par The Chemical Brothers, remontant le niveau sonore global, bien que ceux-ci soient tous dérivés du Lac des cygnes.
Côté photographie, les choses sont bien plus brillantes, le travail de Matthew Libatique, artiste indissociable d'Aronofsky, étant dans la constance, abouti.
Bref, Black Swan, sans être un ratage complet, n'apporte rien au genre, que même Fincher avec son Fight Club et ses gros sabots avait déjà amplement décortiqué pour le Monsieur Tout-le-monde. Natalie Portman s'en sort néanmoins très bien, toujours communicative dans ses sentiments, que ça soit la haine, l'amour, la joie, ou la tristesse, et grâce à son élégance réussit habillement à captiver le spectateur. Vincent Cassel se fait éclipser par le jeu de Portman, ainsi que par celui de Mila Kunis, qui hormis 70s show n'avait pas fait grand chose, hormis le sympathique (mais brouillon) After Sex, et que l'on croyait prédestinée à n'enchainer que les conneries.
Pour conclure, si vous êtes un rookie question schizophrénie et que pour vous le mystère du téléphone jaune et du labyrinthe maudit reste une énigme, vous serez probablement plus réceptif que je ne l'ai été. En somme un film à voir, pas forcément tout de suite, mais à un moment ou à un autre.
Mention spéciale qui revient évidemment à la danse de Natalie Portman en cygne noir, qui est d'une justesse et d'une précision incroyable, effrayante autant que subjuguante, mais ça reste assez maigre de construire tout un film en ayant dans sa besace qu'une scène qui vaille vraiment le coup...