Ars est celare artem

Lorsqu’une comédie française récente n’est pas basée sur un humour bourgeois de droite voire d’extrême droite, (Qu’est-ce qu’on a fait au bon Dieu, Qu’est-ce qu’on a encore fait au bon Dieu, Cocorico, Irréductible etc) ou un humour un peu lourd (Alad’2, C’était mieux demain, Certains l’aiment chauve…), c’est déjà pas inintéressant.Certes ce film n’est pas non plus un chef d’oeuvre et il faut un peu se calmer sur les comparaisons avec « Parasite » (2019) de Bong Joon-Ho et « Sans filtre » (2022) de Ruben Östlund, qui à mes yeux sont un cran au-dessus, plus précis, plus incisifs et plus radicaux à la fois dans les choix esthétiques et dans la satire sociale. Ceci étant dit, il faut maintenant saluer un métrage qui a pas mal de qualités:c’est rare de voir un film français aussi critique vis-à-vis des acteurs, c’est assez original d’insister sur le côté fake du jeu d’acteur. Comme dirait Brian de Palma, « Le cinéma, c’est le mensonge 40 images par seconde ». C’est intéressant de déconstruire un exercice tel que le fait de faire semblant de pleurer. C’est ce genre de pratiques qui me donnent envie de tourner avec des acteurs amateurs.Aborder les classes sociales, avoir ce « geste sociologique », même si c’est fait en surface et un peu moins bien traité que chez Bong Joon-Ho et chez Östlund, c’est rare dans une comédie française récente et c’est important dans le contexte actuel où le travail des sociologues est constamment remis en cause par le discours méritocratique via les médias du grand patronat.les dialogues sont plutôt bien écrits et les acteurs sont bons dans leurs rôlesmême si le plan sur le corps de Mehdi est attendu et cliché, globalement la résolution est réussie, et comme l’a souligné la revue Tsounami dans leur interview avec le réalisateur Antony Cordier, ça évite une happy end problématique. Les classes sociales n’ont pas les mêmes intérêts et Cordier et les autres scénaristes Jean-Alain Laban, Steven Mitz et Julie Peyr l’ont compris. Je tiens à dire que la fin de ce film est bien plus pertinente politiquement que la fin de Metropolis, pseudo chef d’oeuvre porté aux nues.