Comment je suis devenu super-héros (2021) est le premier long métrage de Douglas Attal, réalisateur et co-scénariste (avec 4 autres personnes, ce qui est rarement bon signe), et au passage fils du producteur Alain Attal (ça aide). Il est basé sur un roman du même nom, de Gérald Bronner, également scénariste ici.
Le film est dans un style plutôt adulte, réaliste et sombre, dans la lignée de Watchmen (2009) ou The Boys (2019), même s'il est loin d'en avoir le recul ou le cynisme. Mais comme dit papa Attal (d'après wikipédia) :
Ce film ne vise pas à singer les super-héros Marvel sans les moyens des studios américains. […] Il vise à trouver une alternative dans un univers réaliste, pour une œuvre qui parle de notre culture avec une métaphore de notre société et qui interroge la notion d'héroïsme.
Et cette intention est super-intéressante. Sauf que... Comment je suis devenu super-héros (non mais ce titre, quoi...) passe complètement à côté.
Le film pourtant démarrait bien, avec une bonne ambiance, des personnages réussis, de bons acteurs, des thèmes assez classiques mais efficaces comme le nouveau coéquipier, des super-héros désabusés à la retraite, l'arrivée d'une nouvelle drogue dans les rues, etc, hérités à la fois du genre super-héroïque et des buddy-cop movies.
Le film continuait également pas trop mal, touchant à des idées intéressantes comme un Benoît Poelvoorde atteint de Parkinson qui se téléporte de manière incontrôlée ou une spécialiste de troubles psychologiques liés aux super-pouvoirs, le tout dans une enquête assez bien ficelée et sans baisse de rythme.
Puis vient la fin du film, et là, ça part en vrille. On balance tout ce qui a été fait avant, avec Pio Marmaï et le Pack Royal qui décident tout d'un coup de casser des culs façon Superman (dans des scènes d'action mal filmées), Poelvoorde dont Parkinson n'est soudain qu'un lointain souvenir et un méchant dont on ne connaîtra jamais le but (qui semble aller plus loin que juste se faire de l'argent), avec une motivation qui aurait pu fonctionner si elle avait été exploitée avec un peu plus de finesse. On retombe dans un film de super-héros complètement lambda, basique même. Comme si l'inspiration avait soudainement quitté notre brochette de scénaristes.
Et au delà de la déception de cette dernière partie, en se posant deux minutes, on se rend compte que papa Attal nous a bien enfumé. Car finalement, elle est où la spécificité française là dedans ? Sans quelques placements de produits un peu lourds, notamment pour les chaînes d'info, sans les acteurs français, que reste-t-il ? Rien, le film aurait tout aussi bien pu se dérouler aux US... comme l'intrigue du bouquin ! Finalement, le "made in France" n'aura été qu'un simple argument marketing.
Là dessus, on peut comparer Comment je suis devenu super-héros au Chant du Loup (2019), film de sous-marin français. Dans Le Chant du Loup, mettre en scène la France, puissance militaire et nucléaire "mineure" change fondamentalement la dynamique du film par rapport à ses cousins américains.
Bref, Comment je suis devenu super-héros est un film divertissant avec quelques bonnes idées et des bons acteurs, mais qui se plante dans son dernier acte et n'apporte rien de nouveau au genre, ni dans la réflexion, ni dans le contexte. Il se laisse malgré tout bien regarder, en particulier après la cinquantaine de productions ultra aseptisées de Marvel.