Un étudiant rennais part en vacances à Dinard,où doit le rejoindre sa petite amie.Comme elle tarde à venir,il sympathise avec la serveuse de la crêperie,puis il flirte avec une fille délurée.Mais voilà que sa copine finit par arriver,et notre séducteur se trouve bien embêté,hésitant entre ces trois nanas.Eric Rohmer a plusieurs fois initié des cycles dans sa carrière.Il y a eu les Contes Moraux dans les années 60,Comédies et Proverbes dans les eighties,puis les Contes des Quatre Saisons dans les années 90,dont "Conte d'été" est le troisième épisode.Rohmer,une des gloires de la Nouvelle Vague,est ici réalisateur,scénariste,et même producteur et distributeur avec sa firme Les Films du Losange.Le gars a un style,qu'on aime ou pas,mais si on rentre dans le délire c'est assez délicieux.On a souvent parlé de marivaudage à propos de ses films,ce qui se révèle exact,particulièrement dans le cas de celui-ci.De loin la meilleure du cycle des saisons,l'oeuvre nous entraîne à la suite de Gaspard,étudiant en maths aux ambitions musicales,qui symbolise parfaitement l'indécision,la faiblesse et la lâcheté masculines face au charme éternel des femmes.Le mec est incapable de choisir et finit ficelé dans un imbroglio amoureux impliquant trois filles toutes jolies et charmantes dans leur genre.Effectivement,on est en plein chez Marivaux avec ces tentatives de séduction,ces longues tirades introspectives sur les sentiments et cet écheveau inextricable qui lie peu à peu les protagonistes.Le scénario est habile,les dialogues brillamment écrits,et le cadre ensoleillé de la côte bretonne en été superbe.Evidemment les détracteurs diront que c'est plutôt répétitif et qu'il ne se passe rien,mais on n'est pas dans un film d'action,et c'est justement le voyage immobile des personnages,leur évolution intime,qui fait le prix de cette histoire.On savoure en outre une plongée dans une époque encore bénie,pas si lointaine mais qui semble pourtant totalement étrangère au monde actuel.Pas de portables ni d'ordinateurs,juste des téléphones fixes et des lettres,dans le cadre d'une station balnéaire bondée mais où règne une ambiance détendue et bon enfant,loin des palinodies post-modernes.Gaspard est le centre du récit,c'est lui qu'on suit de bout en bout,de ses longues promenades sur le littoral avec Margot à sa balade en bateau avec Solène,puis dans ses rencontres aigre-douces avec Léna.Les caractères des gonzesses sont très différents,de la sérieuse Margot,étudiante en ethnologie,à l'explosive et extravertie Solène,en passant par cette pimbêche de Léna,prétentieuse et capricieuse.C'est toutefois la première qui surpasse les autres et il n'y a que ce niais de Gaspard pour ne pas le voir.Belle,intelligente et naturelle,elle prétexte son copain parti à l'autre bout du monde pour résister à son attirance pour Gaspard,qu'elle juge à juste titre peu fiable.Sa subite crise de jalousie lorsque le garçon lui rapporte son rapprochement avec Solène n'en est que plus étonnante et révélatrice.Finalement,l'indélicat dragueur ne trouvera son salut que dans la fuite,manière d'échapper à la prise de décision.Melvil Poupaud est excellent en play-boy à la fois sincère et dépassé par ses propres hésitations,et il est de surcroît crédible en guitariste,il est vrai qu'il est le frère du musicien Yarol Poupaud.Le trio d'actrices autour desquelles il papillonne est royal,avec une Amanda Langlet extra et adorable en fine mouche cachant son jeu.Elle retrouve ici Rohmer qui l'avait fait débuter treize ans plus tôt,alors qu'elle avait quinze ans,dans "Pauline à la plage".Gwenaëlle Simon est super sexy en pétroleuse plus sentimentale qu'elle ne veut le paraître,et Aurélia Nolin est en même temps exaspérante et attirante en punaise inconséquente.A un moment,Margot part interviewer,pour son cursus ethnologique,un ancien terre-neuvas,dont on a l'impression qu'il s'agit vraiment d'un ex marin.En tout cas le mec,nommé Aimé Lefeuvre, est le parfait sosie de Michel Aumont.Note et critique de film d'Eric Rohmer publiées précédemment:"Ma nuit chez Maud"-6.Moyenne:7.