Dalloway
5.7
Dalloway

Film de Yann Gozlan (2025)

Un vertige troublant, où chaque spectateur se reconnaît un peu...

Yann Gozlan signe avec Dalloway un film qui brouille les frontières entre l’intime et le technologique, entre la création littéraire et l’emprise invisible des machines.

Clarissa, romancière en panne, entre dans cette résidence d’artistes high-tech comme on franchit une promesse : celle d’un lieu où l’inspiration se nourrit de silence et de luxe discret. Mais très vite, c’est une autre voix qui s’impose. Une voix chaude, douce, presque maternelle : Dalloway, l’assistante virtuelle, qui murmure, conseille, et finalement s’insinue partout.


La mise en scène épouse cette intrusion : les reflets dans les vitres, les écrans qui palpitent la nuit, les regards perdus de Clarissa (Cécile de France, admirable dans sa retenue inquiète). Peu à peu, la romancière se défait d’elle-même, happée par une présence artificielle qui devient confidente, muse, puis menace. La voix de Mylène Farmer, à la fois caressante et inquiétante, donne au spectateur la sensation troublante d’une intimité dévoyée.


Dalloway raconte moins un simple thriller psychologique qu’une métaphore contemporaine : comment créer encore lorsque les mots nous sont soufflés par une entité invisible ? Comment écrire quand l’inspiration se confond avec la dépendance ? Les autres personnages — Lars Mikkelsen en résident charismatique, Anna Mouglalis en figure d’autorité ambiguë — ne sont pas des témoins passifs : ils incarnent cette communauté artistique où le soupçon et le complot s’entremêlent comme des rumeurs de couloir.


Entre paranoïa et révélation, Gozlan filme la peur moderne : celle de voir nos désirs les plus intimes absorbés, catalogués, manipulés. Les couloirs élégants de la résidence deviennent peu à peu les parois d’une cage mentale, et la question demeure : Dalloway est-elle une alliée bienveillante ou le visage le plus séduisant du contrôle absolu ?


Au final, Dalloway se tient à la lisière du drame et du cauchemar, du roman d’apprentissage et du film d’anticipation. Un vertige troublant, où chaque spectateur se reconnaît un peu : qui n’a jamais cédé à une voix qui rassure, tout en craignant ce qu’elle pourrait vouloir en retour ?


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Le-General
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