Destination Finale, c’est avant tout une saga horrifique qui s'est toujours contentée du strict minimum. Si le premier opus pouvait séduire par son concept original et une mise en scène correcte, les suites ont rapidement sombré dans la redite, recyclant sans cesse la même recette : une prémonition, un sauvetage, des morts invraisemblables et sanglantes (de préférence), avec quelques éléments récurrents disséminés ici et là (le nombre 180, le camion de rondins, le médecin légiste...) pour donner une illusion de continuité. Rien de plus que ce que le public attend : des morts originales, du gore, et basta.
Les rares efforts d’écriture se limitaient à l’introduction de nouvelles règles pour tromper la mort, souvent appliquées de façon incohérente d’un film à l’autre, voire au sein d’un même épisode. C’est dommage, car avec un peu plus de rigueur et de respect pour le potentiel de l’univers, il aurait été possible d’instaurer une véritable progression, voire une mythologie plus solide. En l’état, même si la saga est indéniablement culte, il reste difficile de la considérer comme "de qualité", même au sein du genre horrifique.
Au fond, ce qui distingue un bon Destination Finale d’un mauvais, ce sont les personnages. Leur écriture, leur développement, leurs relations et leurs particularités individuelles. C’est ce qui plaçait jusqu’ici le premier et le cinquième opus au sommet de la licence.
Alors, qu’en est-il de Bloodlines, 14 ans après le dernier film ?
Même si on ne s’attendait pas forcément à une renaissance, après autant d’attente, on pouvait au moins espérer un minimum de nouveauté.
Tout d’abord, il faut reconnaître un effort dans la mise en scène et dans l’intrigue, bien plus travaillé que dans certains des épisodes précédents. Les morts, toujours aussi absurdes et violentes, sont bien chorégraphiées, même si la qualité des effets numériques est franchement décevante pour 2025 : à peine meilleure que celle de 2011.
On note aussi une volonté d’innover avec une nouvelle idée autour de l’“ordre de mort”, ainsi qu’une tentative sincère d’enrichir l’univers, notamment en expliquant l’origine d’un personnage récurrent et en introduisant quelques éléments inédits. Mais ces ajouts seuls, même s’ils sont appréciables, font davantage figure de miettes de pain que de vrai repas.
Là où Bloodlines se démarque vraiment des autres opus, c’est par la qualité de ses personnages. Certes, leur nombre élevé limite un développement individuel approfondi — certains sont même traités de manière très sommaire, réduits au rôle de simples victimes en attente de leur tour. Mais leurs liens familiaux leur confèrent une véritable cohérence d’ensemble, et la plupart jouent un rôle tangible dans la dynamique du groupe, avec suffisamment de personnalité et d’interactions pour dépasser le stade des archétypes. Par moments, on a presque l’impression de regarder un drame à enjeux plutôt qu’un produit d’horreur formaté. Dommage que cet aspect soit un peu amoindri par des morts quelques fois trop expéditives : elles auraient mérité un impact narratif ou émotionnel plus fort. Mais après tout, c’est aussi la licence qui veut ça.
D’ailleurs, ce qui est également appréciable, c’est que ce nouvel opus tente une approche différente en tournant son propre concept en dérision, en jouant la carte de l’humour noir — là où certains des précédents se prenaient un peu trop au sérieux, alors même que le concept de la saga est, disons-le, franchement débile. Sans réellement renouveler la licence, Bloodline apporte tout de même un souffle rafraîchissant grâce à ce second degré bien dosé.
Enfin, dommage que la bande-annonce nous spoil certaines des meilleurs scènes. Même si elle ne dévoile pas tous les détails, le plaisir de la surprise s’en trouve amoindri.
Et mention spéciale à Tony Todd, que l’on retrouve une dernière fois dans son rôle emblématique. Il fait ses adieux en s’adressant directement aux spectateurs à travers les mots de son personnage. RIP.
En conclusion, Bloodlines mérite sans doute sa place parmi les meilleurs opus de la franchise. Le film fait des efforts, tente quelques nouveautés, soigne sa mise en scène et son écriture… Mais il ne faut pas abuser : sur le fond, ça reste la même bouillie, un peu réchauffée, avec deux-trois toppings en plus. Divertissant, oui, mais certainement pas de quoi en faire le film d’horreur de l’année.