La froideur du sable

Dune n'est pas un film de Denis Villeneuve comme les autres. Là où dans ces précédents longs-métrages, le réalisateur posait un sujet très intime et personnel au personnage principal qui lançait ensuite dans son univers, Dune ne possède aucune intimité propre qui pourrait nous relier à ses protagonistes. Ca pourrait être un défaut mais c'est ce qui, je trouve, fait partie de l'ambiance qu'il a voulu donner.

Au delà de l'image somptueuse (mais bien plus conventionnelle que celle de Roger Deakins dans Blade Runner 2049), et des décors magnifiques proposant une expérience cinématographique pure, dans ces déserts de sables et ces planètes variées, ce qui va donner la force du film est son ton très froid. Le film a une ambiance pesante, où chaque personnage semble être dépossédé de son âme. La moindre légèreté est même difficile à prendre pour ce qu'elle est, car Dune parvient à instaurer une atmosphère très tendue, en nous racontant les sombres conflits politiques et fantastiques qui entourent Paul, le personnage principal. On laisse de coté le plus possible l'action facile pour prendre le temps de poser le contexte et raconter l'histoire, ce qui est une qualité devenue beaucoup trop rare dans ce genre de films. Villeneuve n'hésite pas à laisser languir sa mise en scène, sans être poussif dans les dialogues, juste en laissant l'action de la scène se faire, ce qui marque d'autant plus la froideur et la lourdeur de ce monde dans lequel personne n'aimerait vivre.

Mais je n'ai pu avoir de l'empathie qu'envers la mère de Paul (jouée par la géniale Rebecca Fergusson) qui apporte le doute qu'elle a envers ses convictions, et ce qui est bon ou mauvais pour son fils. Un doute humain qui nous permet de nous lier plus à elle qu'aux autres personnages, qui restent souvent de marbre face à une situation qu'ils semblent plus subir qu'autre chose. Je ne sais pas si Villeneuve a fait exprès de choisir des têtes connues pour jouer tous ces rôles secondaires très mornes, mais je pense que l'effet de froideur est purement voulu dans le jeu de ses personnages. Seul Timothée Chalamet m'a un peu gêné, pas parce qu'il joue mal, mais parce qu'il fait un peu trop erreur de casting, comme Zendaya. Ce sont deux protagonistes qui représentent l'avenir du monde, et par conséquent, qui sont les seuls à même de donner un peu d'espoir dans les yeux fatigués des autres personnages. C'est d'ailleurs peut être ça qui m'a au premier abords un peu dérangé, c'est la naïveté de leur jeunesse.

Mais le film reste une franche réussite. Son ambiance pesante, ces personnages froids, ses décors , sa lumière soignée, et aussi sa musique, en font un "blockbuster" pas comme les autres, mature, qui ne prend pas ses spectateurs pour des vaches à lait, et prend le temps d'expliquer son univers pour ensuite donner un climax très puissant et un symbole de renaissance qui ne laisse espérer que du bon (voire du mieux) pour la 2e partie, qui laissera peut-être place à plus de lumière.