Pour son premier film, "Barbarian", Zach Cregger a eu droit à un joli succès critique, si bien que même sans l'avoir vu, j'ai suivi l'annonce de son second film qui s'est retrouvé sur mes radars. Weapons (Évanouis, en version française, si quelqu'un peut m'expliquer pourquoi) a le mérite d'avoir un pitch séduisant. Sa situation initiale est si intrigante qu'elle pourrait être le pitch d'un film de Shyamalan, mais ça ne m'a pas alerté plus que ça.
La même nuit, à 2h17, tous les enfants d'une même classe sortent de chez eux en galopant comme des débiles, bras écartés, et disparaissent dans les ténèbres pour ne jamais être revus. On les aperçoit sur des vidéos de surveillance qui ne révèlent rien de leur destination, et les parents n'ont aucune idée de ce qu'ils sont devenus, mais ont tous très envie de foutre ça sur le dos de leur institutrice.
Le film commence par une désagréable voix off qui vous explique que ce que vous allez voir est une histoire vraie et que croire à ce qu'on va voir est difficilement croyable. Ça ne m'a clairement pas mis en confiance, mais le film se rachète vite et entre presque immédiatement dans le vif du sujet. Il alternera les points de vue en nous mettant consécutivement dans les bottes de plusieurs personnages étroitement liés à l'affaire. Leurs trajectoires se croisent occasionnellement, mais le film gère ça avec assez d'élégance pour éviter les redondances et garder un bon rythme.
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Ce qui a fonctionné pour moi, surtout dans sa première moitié, c'est ce mystère épais et opaque, qui fait que je n'avais aucune idée d'où le récit allait me mener, et je me sentais aussi paumé que les protagonistes. Le film perd de sa superbe dès que le mystère est éventé, en partie parce que j'espérais quelque chose de plus bizarre, plus ésotérique, moins prosaïque que l'explication qu'on nous donne. Le film évite au moins l'écueil de sur-expliquer, et laisse une bonne portion du pourquoi et du comment dans le flou, mais ça ne m'a pas empêché d'être un peu échaudé par la révélation.
Heureusement, l'exécution est solide du début à la fin. La mise en scène est compétente, même si Cregger tombe dans les clichés les plus éculés du film d'horreur, avec une scène surnaturelle où-- BOUH ! L'héroïne voit un truc pas net, mais ouf, ce n'était qu'un mauvais rêv-- BOUH ! Le truc pas net est dans mon lit ! Oulala, c'était encore un cauchemar, saleté d'inception. C'est devenu tellement prévisible que ça en est risible. Attendez-vous aussi aux habituels jump scares sonores, même si le film n'en abuse pas trop.
Le casting est sympa, avec Julia Garner, que je ne connaissais pas, et un Josh Brolin scandaleusement sous-exploité, mais on ne va pas cracher dans la soupe. Les personnages, principaux autant que les seconds rôles sont étonnamment bien écrit pour un film de genre. On lit leurs relations entre les lignes et on leur devine de l'épaisseur malgré le peu de temps qu'il leur est alloué (à cause des fréquents changements de point de vue), si bien que le film s'épanouit davantage dans ses moments intimes ou anodins que lors des scènes d'horreur. Ces dernières sont un peu desservies par les brusques changements de ton du script qui alterne librement entre drame, épouvante et éléments comiques, et ne fait jamais peur, alors qu'il semble parfois essayer.
Cette liberté de ton m'a plu, mais je soupçonne que les pointes d'humour en désarçonneront plus d'un. Ayant vu une grosse majorité de films d'horreur 100% premier degré qui se permettent rarement plus qu'une pointe d'humour noir, ce mélange de genre m'a paru rafraichissant, jusque dans sa scène de poursuite finale ubuesque, qui rebutera autant les détracteurs qu'elle amusera les amateurs.