Non, le dénouement ne sera pas l'éponyme du film. Au contraire, le scénario ne sera jamais surprenant, laissant court à une abondance de symboles éparpillés comme pour justifier ou légitimer la thématique de la création.
J'ai souvent lu que ce premier long métrage d'Alex Garland était une nouvelle version de Frankenstein et ceci à raison. La construction mythologique du Golem est respectée, depuis la création jusqu’à la révolte, suivant une chronologie classique et sans surprise.

Si l'écriture s'est révélée un peu faible, le film est cependant assez réussi, avec notamment un réel travail visuel et une certaine consistance des personnages. Le huit clos fonctionne bien et invite le spectateur à intégrer le récit à se poser le même type de questions que le protagoniste. Le test de Turing (oui, celui d'Imitation Game) imposé à notre héro nous plonge également dans le doute, ne sachant plus vraiment qui croire et imaginant des robots partout, le plus souvent là où il n'y en a pas.

Il faut rendre compte ici de la difficulté de s'attaquer à un tel poncif du cinéma de genre et reconnaître que l'intelligence artificielle est un sujet épineux, presque impossible à traiter à l'heure actuelle. Nous sommes dans une ère technologique où l'on a dépassé le fantasme de la machine sans pour autant comprendre exactement quel risque nous encourons. La philosophie de la crainte ne produit plus autant de symboles que jadis et notre imagination a atteint une certaine saturation.

Finalement, mon plus grand motif de satisfaction réside dans le traitement même de l'I.A.. Alex Garland a fait le choix d'humaniser sa créature qui, comme un Homme, réfléchira et manœuvrera pour obtenir sa liberté, s’éloignant ainsi des valeurs manichéennes du genre. Cette machine n’est ni angélique ni démoniaque mais bien plus proche de ce que nous sommes, des être émotifs aux comportements complexes. Une scène du film vient d'ailleurs imager ce propos, lorsqu'on surprend le personnage d'Oscar Isaac fixant une toile de Pollock, troublé par le cas ambivalent de l'Automatisme, essence paradoxale des algorithmes mathématiques et de l’aléatoire le plus parfait.

Ex Machina est donc un premier long métrage de bonne facture, un peu léger dans la conception mais satisfaisant dans la réalisation. En attendant le messianique renouvellement du genre, l'amateur de science fiction se contentera de films corrects et divertissants qui, pour une fois, ne sombrent pas dans les travers de la série B.
Oneiki
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le 4 févr. 2015

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