Manchester, 70’s.
George Khan, immigré pakistanais, est l’heureux père de sept enfants. Dans leur éducation, sa



rigueur religieuse traditionnelle



est contrebalancée par l’insouciante fraîcheur britannique de son épouse Ella. Un équilibre fragile mais stable. Jusqu’à ce que sa richesse se dérobe : son aîné, Nazir, quitte la cérémonie de son mariage arrangé, et la maison familiale, sans oser parler à quiconque de son homosexualité. Pour rattraper cette faute, et intégrer du mieux qu’il peut sa famille à la société musulmane locale, George tente alors de préparer le mariage de ses deux fils suivants : Tariq et Abdul.


Sur fond de traditionalisme dépassé par les réalités du quotidien des enfants de l’Angleterre contemporaine, East is East la joue comédie avant tout. Et de nombreuses scènes servent le divertissement. Mais le tragique des situations touche, énormément. Le rire laisse la place aux larmes tant les incompréhensions empoisonnent la vie de cette riche et belle famille. Om Puri y incarne un George Khan borné, obnubilé par la religion et l’image qu’il renvoie, obnubilé par une certaine idée de l’intégration, peu en prise avec les attentes et les espoirs de ses enfants, obnubilé par les préceptes ancestraux qu’il a cru avoir emmené avec lui plusieurs années plus tôt, lors de son arrivée en Angleterre. Son comportement suscite à la fois l’incompréhension de son épouse aimante, et la peur, voire la haine, de ses enfants. Avec Linda Bassett dans le rôle d’Ella, ils ont donné de leur corps pour donner vie à ce couple. Une intense partition jouée avec intelligence, émotion et précision. La mise en scène l’a d’ailleurs compris : tout se raconte dans les relations fraternelles et les comédiens semblent s’exprimer avec une grande liberté. Un plaisir qui appuie la véracité des situations. Comédie britannique oblige : ç’a toujours été ce



réalisme social où l’ordinaire touche à l’universel.



Cette admirable comédie dramatique, au rythme enlevé et à la narration intense, servie par d’excellents comédiens, tous à la mesure juste du rôle, est un petit bijou du cinéma britannique. C’est comme souvent une belle étude sociologique, ici de l’intégration derrière le voile, et qui finit par renvoyer le personnage principal à la seule question qu’il aurait toujours dû se poser : est-il heureux ? Vit-il en conformité à l’image qu’il se faisait du bonheur ?
Mais de là à perdre la foi.


Matthieu Marsan-Bacheré

Matthieu_Marsan-Bach
7

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Créée

le 10 avr. 2015

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