Gainsbourg (vie héroïque) par tizboe
Sfar évite l'écueil de la biographie lourdingue en romançant la vie de ce mec, déjà personnage de son vivant. Il en sculpte la matière brute pour mieux en tirer la substance, et aboutit à un chef d'oeuvre de fantaisie, un hymne à la liberté, 2h10 de bonheur. Pour un nom inconnu du cinéma, on distinguera la patte d'un réalisteur inspiré et exigeant, qui ne se prive pas de ressasser les thèmes qui lui sont chers (judéité, dessin orgasmique, manières de conteur), ce qui pourra en agacer certains. Mais les meilleurs films ne sont-ils pas ceux qu'on a une bonne raison de détester ? Il est du reste passionnant de voir comment l'oeuvre commencé en BD se poursuit à l'écran dans un élan global, ce qui confirme Sfar dans son statut de grand auteur polyvalent. Lequel soigne sa grosse tête en la tournant en dérision à grand renfort de carton-pâte. Sfar est un jouisseur qui partage sa passion, comme en témoignent ses choix musicaux et sa distribution ; il aime les belles femmes et le montre au travers d'une pléiade d'actrices au charme et à la sensualité exacerbés. Eric Elmosnino est proprement bluffant, à se demander s'il ne partage pas des gènes avec son personnage. Cerise sur le gâteau, le copinage dans le choix des rôles secondaires, facétie de potache qui ravira les amateurs de devinettes.