Good Boy
5.9
Good Boy

Film de Ben Leonberg (2025)

Présenté au festival SXSW 2025, Good Boy de Ben Leonberg s’impose comme une expérience singulière dans le paysage de l’horreur contemporaine. Le film repose sur un dispositif narratif minimaliste : raconter une histoire de hantise à travers la perception d’un chien. Ce déplacement du regard humain vers l’animal modifie profondément la nature de la peur, qui devient une expérience perceptive plutôt qu’un simple effet dramatique.


La linéarité du scénario, souvent relevée par la critique comme un défaut apparent, apparaît ici comme une construction volontaire. En renonçant à la progression dramatique classique, Leonberg adopte le rythme attentif et répétitif du chien. Le film se déploie dans une temporalité de guet, d’attente, de micro-variations. Ce choix formel transforme le spectateur en animal de compagnie du récit : il doit apprendre à voir, non à comprendre. La peur se diffuse non par l’action, mais par la continuité du regard.


L’espace domestique agit comme le prolongement sensoriel de cette conscience en alerte. Les murs respirent, les sols craquent, les sons se chargent d’une vie propre. À mesure que le film avance, les bruitages acquièrent une dimension ambiguë : ils ne décrivent plus le réel, ils le transforment. Cette intensité sonore provoque un glissement de la perception — le spectateur entre en osmose avec le protagoniste canin, comme doté d’une ouïe et d’un odorat décuplés. Froissements, halètements et souffles prennent une épaisseur presque tactile. L’horreur s’ancre dans la matière du son plutôt que dans l’image.


La photographie, d’une sobriété remarquable, prolonge cette économie sensorielle. Les plans fixes, les cadrages bas, les contrastes de lumière composent un espace à la fois concret et spectral. Leonberg refuse la surenchère visuelle pour privilégier la sensation d’un monde perçu depuis un seuil, entre la veille et l’instinct. L’image n’explique rien : elle écoute.


Indy, au centre du dispositif, ne joue pas : il incarne. Chaque mouvement, chaque tension du corps, chaque regard suspendu inscrit la peur dans la durée. Son jeu, d’une précision instinctive, confère au film une force d’incarnation que la mise en scène capte sans l’exploiter. Le chien devient pure présence, surface sensible où se projette la peur du monde.


Good Boy est moins un film d’horreur qu’une méditation sur la perception. En plaçant la caméra à hauteur de museau, Leonberg décentre le regard humain et révèle un cinéma de l’écoute, du souffle et du tremblement. La peur, ici, n’est plus un spectacle, mais un mode d’existence. 


ZolaNtondo
6
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le 11 oct. 2025

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