Pour les fans de ce monstre du cinéma US, 2008 sonnait comme une aubaine : deux films réalisés coup sur coup sortaient sur les écrans américains, porteurs de cette marque très particulière des films Clint Eastwoodiens, qui associe un esthétisme travaillé et une thématique de fond poussée. Après le diptyque Lettres d'Iwo Jiwa et de Mémoire de nos pères, Eastwood était revenu avec l'excellent Changeling, présenté en exclusivité à Cannes. A quelques jours de la sortie de Gran Torino, le public en frémit d'avance. Et à juste raison...

De nos jours, dans un quartier résidentiel américain, Walt Kowalski enterre sa femme. Les premières images laissent apparaître un homme renfermé et amer, dont les relations sociales et familiales sont aussi glaciales qu'inexistantes. Pour cet ancien soldat, traumatisé par la guerre de Corée, seuls quelques rituels comptent : se rendre chez le coiffeur, prendre soin de sa voiture, une Ford Gran Torino, et s'occuper de son chien.

Raciste, regrettant une Amérique devenue métissée et un quartier désormais habité par des immigrés, il limite au maximum ses interactions sociales, et n'est pas très enclin à sourire à ses voisins. Pourtant, alors qu'un soir le fils de ses voisins asiatique est embêté par un gang du coin, il sort son vieux fusil et s'assure de faire respecter son périmètre. Il devient alors malgré lui le héros du quartier, remercié par toute la communauté asiatique de la ville.

Pour le remercier, et s'excuser de la tentative de vol de sa Gran Torino à laquelle Tao a été contraint bien malgré lui, la mère de Tao propose à Walt de mettre à disposition l'adolescent pour une semaine de travaux. Le vieil homme acariâtre et solitaire va alors peu à peu s'ouvrir au contact de cet ado qu'il méprisait à cause de ses origines, et devenir la figure paternelle manquante pour le jeune homme. Et quand le gang reviendra à la charge, Walt fera le nécessaire pour en débarrasser le quartier...

C'est un bien joli film que ce Gran Torino, même si on a connu Eastwood plus engagé ou plus vibrant. L'émotion est un peu facile, et l'histoire prévisible (le vieux monsieur méchant qui s'adoucit grâce à la patience d'une personne), mais Gran Torino s'inquiète de problématiques concrètes, telles que le racisme, à une heure où l'Amérique est sujette à des changements sociaux historiques, dont l'élection du Président Obama pour ne citer qu'elle. Sans être un chef d'œuvre, Gran Torino est agréable et intelligent, et offre à Clint Eastwood l'occasion de terminer son film comme un "au revoir" : avec classe et modestie.
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le 28 sept. 2010

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Brice B

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