Grosse fatigue est un OFNI. Comprenez par là un Objet Filmique Non Identifié. Je crois que c'était une comédie. Il y a Michel Blanc, la troupe du Splendid au grand complet qui vient faire un petit coucou. Mais non. On n'est pas chez Patrice Leconte. On est chez Michel Blanc. Réalisateur, scénariste et acteur de Grosse Fatigue.
Michel Blanc, comédien de son état, se trouve un jour poursuivi par la police, et par Carole Bouquet accessoirement, pour avoir violé Josiane Balasko. Est-il en train de devenir fou ? Lui qui cherche désespérément à écrire un nouveau scénario parce que "Marche à l'ombre, ça fait déjà dix ans".
Grosse fatigue montre les affres de la célébrité. La schizophrénie qu'engendre le métier de comédien. A force d'interpréter une multitude de personnages. Même si pour Michel Blanc, on l'a souvent cantonné dans les années 80 à un éternel rôle de squatteur-looseur, Tenue de soirée et Monsieur Hire auront changé la donne.
Il y a aussi un vrai malaise qui s'instaure quant il parle de son physique. Il en a joué dans les Bronzés ou ces comédies de boulevard qu'il a tournées au début des années 80. Ce physique ingrat. Chauve, moustachu. Certes, ça faisait rigoler à l'époque mais j'ai toujours senti une vraie souffrance en lui à ce niveau-là et on le voit dans Grosse Fatigue et Mauvaise passe aussi il me semble.
Blanc, dans les toutes dernières scènes, se livre également à un règlement de compte en bonne et due forme du cinéma français qu'il juge mort. C'est donc un curieux film où à un moment on ne sait plus bien qui est Michel Blanc et qui est le sosie. Si l'acteur n'est pas en train de devenir fou, qu'il vit un cauchemar et qu'il va finir par se réveiller. Mais aussi un film où son acteur/réalisateur jette un regard lucide sur le milieu du cinéma en général et sa propre carrière en particulier. Dommage qu'il soit aussi rare derrière la caméra car avec des comédies de cet acabit, le cinéma français ne pourrait que s'en porter mieux.