Note personnelle : 5/10
Heleno : O Príncipe Maldito ambitionne de dresser le portrait à la fois sublime et tragique d’Heleno de Freitas, légende brésilienne du football des années 1940. La promesse est forte : raconter l’ascension et la chute d’un génie incontrôlable. Le film séduit d’emblée par son esthétique saisissante et une interprétation fiévreuse de Rodrigo Santoro. Pourtant, au-delà de la beauté formelle, l’émotion reste en retrait, comme si l’image avait pris le pas sur le récit.
La mise en scène en noir et blanc, volontairement stylisée, donne au film un cachet rétro saisissant, presque hypnotique. On pense parfois à Raging Bull de Scorsese dans cette volonté de capturer la violence intérieure d’un homme à travers une photographie rugueuse et contrastée. Le cadre est élégant, chaque plan respire une certaine nostalgie, une volonté de mythiser ce joueur au tempérament volcanique.
Mais cette beauté visuelle devient aussi son piège : à force de styliser, le film semble figer son sujet dans une posture de malédiction permanente. On assiste à une succession de scènes d'excès – colères, trahisons, errances – sans qu'une réelle évolution dramatique n'émerge. Le scénario martèle une idée plus qu’il ne la développe : Heleno était un génie autodestructeur, point final. La répétition des motifs finit par affaiblir l’impact émotionnel.
L’interprétation de Rodrigo Santoro mérite toutefois d’être saluée. Il incarne avec intensité les flamboyances et les fractures d’Heleno. Mais son engagement semble parfois contrecarré par une écriture qui confond complexité et chaos. Là où un personnage tragique devrait révéler ses failles par touches, Heleno reste une énigme tapageuse, constamment au bord de l’explosion.
Ce manque de nuance se reflète aussi dans le traitement des personnages secondaires, trop souvent relégués au rôle de simples satellites autour du héros. Que ce soit sa femme, ses coéquipiers ou ses médecins, aucun n’est suffisamment développé pour créer un réel contrepoint ou une perspective humaine alternative. La relation avec sa compagne notamment, pourtant centrale, reste traitée de manière mécanique, comme un écho à sa chute, sans profondeur émotionnelle. On aurait aimé que ces figures secondaires soient plus que de simples témoins passifs de la chute d’Heleno, qu’elles existent réellement, qu’elles résonnent.
En somme, Heleno est un film qui fascine par sa forme mais échoue à pleinement captiver par son fond. Il évoque un destin tragique avec passion, mais sans la justesse nécessaire pour en tirer toute la puissance dramatique. Un bel écrin pour une histoire dont le cœur semble, hélas, un peu vide.