Après Crazy Heart, Les Brasiers de la Colère et Strictly Criminal, le réalisateur/scénariste américain Scott Cooper continue, avec Hostiles, de questionner l’histoire de l’Amérique. Si ses films précédents tournaient indubitablement autour du western, il s’y engage cette fois pleinement pour livrer un regard sans concession sur le conflit faisant rage entre le peuple américain et les natifs. Bien sûr, en installant son récit à la fin du 19e siècle, il s’intéresse davantage aux conséquences de l’affrontement qu’à ses prémices. Néanmoins, l’incroyable profondeur des personnages contextualise rapidement les hostilités et renvoie subtilement à leurs origines. Il ne faut d’ailleurs attendre que les deux premières séquences du long-métrage pour se convaincre de sa grande finesse d’écriture, le cinéaste renvoyant dos à dos les deux camps dans une violence verbale et visuelle absolument tétanisante. Le tout sans juger et sans asséner un quelconque discours moralisateur. Une approche infiniment louable qui n’empêche toutefois pas le film d’interroger profondément les actions de chacun, le parcours des personnages se révélant finalement un véritable voyage d’introspection, d’abandon, de deuil, de souffrance et de pardon.


Dans la plus pure tradition du genre, Hostiles propose également un visuel particulièrement somptueux, caractérisé par des décors grandioses qui contrastent joliment avec l’intimité du récit. Des images superbes qui peuvent aussi s’appuyer sur une musique mémorable de Max Richter (The Leftovers), le compositeur allemand signant certainement ici l’une de ses plus belles BO. Si la mise en scène de Scott Cooper s’avère plutôt inspirée et maîtrisée, on regrettera en revanche le didactisme du montage, source de quelques longueurs dans la seconde moitié du récit. Au-delà de ses fabuleuses qualités formelles, le film bouleverse néanmoins principalement par le portrait déchirant de ses personnages. Finement écrits, ceux-ci se font le symbole du changement qui est en train de s’opérer dans le monde (modification des mentalités, avènement de l’industrialisation…). Ils peuvent, en outre, compter sur un casting exemplaire pour les incarner. Christian Bale, tout d’abord, délivre une performance tout en retenue dans la peau de ce soldat dont les convictions ne cessent de s’étioler à mesure qu’il progresse. Rosamund Pike, ensuite, brille par sa détresse touchante et sa fureur exaltante. Enfin, les seconds rôles que sont Wes Studi, Rory Cochrane, Jesse Plemons ou Ben Foster ne dénotent absolument pas, livrant eux aussi une interprétation engagée.


Aussi émouvant qu’éprouvant, Hostiles s’impose donc comme un western bouleversant, une introspection douloureuse mais brillante. Malgré son rythme lent et ses quelques longueurs, le film met en scène un périple totalement inoubliable, dont la violence (jamais gratuite) n’a d’égal que son intimité. Un drame tout en nuances, emmené par un Christian Bale phénoménal !


https://cinerama7art.com/2018/04/16/critique-hostiles/

Wolvy128
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le 16 avr. 2018

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