Retour à la terre
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Donc, comme histoire c'est d'un sinistre achevé et, comme point de vue philosophique, cela ne vole pas très haut. Moralité, les étasuniens sont maudits à jamais et ne méritent décidément pas de vivre. Le suicide collectif devrait s'imposer mais nombreux sont ceux qui semblent faire la sourde oreille. Le film ne les aurait donc pas convaincus. Ah oui, c'est juste un film !
Mais alors, il sert à quoi ce film ? On se tape trois fois sur la poitrine et on va manger un hamburger en essuyant une larme ? Quel bande de faux jetons ces étasuniens, toujours à tripoter leur bible et à espérer une improbable rédemption pour leurs crimes. L'affreux petit Bush pleurnichant après avoir fait massacré un million de civils irakiens " Mais nous sommes si bons !"
Bon heureusement qu'il y a Wes Studi, l'indien éternel.
Ce film est malhonnête parce que pour justifier son improbable scénario et tenter de donner une sorte de justification à la soldatesque qui "a fait son travail", il fallait donc introduire une horde de sauvages bien gores; ici des comanches, on ne sait pourquoi. A ce stade, on oublie soigneusement de les replacer dans un quelconque contexte : d'affreux barbares qui tuent des enfants voilà tout. Il fallait ce lamentable manichéisme pour introduire la suite et donner quelque sens au surgissement de cet humanisme tardif. Ça dit tout bêtement " ben les indiens, certains étaient drôlement méchants tout de même !" Et hop, cela ouvre donc la porte à cette fameuse rédemption.
Peau de Bale !
Mais voyons donc la remarquable analyse faite par Jean-Paul Curnier concernant l'histoire étasunienne et qui explique bien le fond du problème :
"Il n'y a que deux voies possibles pour les États-Unis d'Amérique de se constituer une histoire : soit une explication par la mission divine d'un peuple élu et civilisateur (...); soit celle du pillage pur et simple, commis par une horde toujours plus grande de prédateurs sans scrupule ni conscience morale qu'incarne à sa façon la face sombre de l'histoire des pionniers de l'Ouest.
Dieu existe donc en Amérique. Et cela, parce que il est tout simplement nécessaire qu'il en soit ainsi. (...) Il est impossible que Dieu n'existe pas, sauf à penser que nous sommes des criminels mus par la seule cupidité et par l'immoralité. Dieu est consubstantiel à l'Amérique.
Une expression, devenue inséparable des mythes fondateurs des USA, le dit sans détour; celle de Destinée manifeste.(...)
Car le concept de "Destinée manifeste" n'a pas vocation à décrire, à comprendre ou à commenter le cours de l'histoire, encore moins à penser les conquêtes américaines.
Il est d'essence prédatrice, il rassemble la geste pateline des pères fondateurs missionnaires avec le futur fait de furie, de haine, d'avidité et de sang de la colonisation en marche. Il désigne comme une volonté de la Providence les meurtres et les pillages en cours et à venir." (La piraterie dans l'âme - Chap. VIII)
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le 16 avr. 2018
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