"BLUM" quand notre coeur fait "BLUM", tout avec lui dit "BLUM" (air connu)

Jason BLUM, c'est un peu comme ta copine bobo du XVI ème arrondissement. Elle a un super poste au service marketing dans une grosse boite, possède la photo d'un petit enfant africain dans sa bibliothèque, rempaille les vieilles chaises balancées aux encombrants et chine des vieux bouts de macramés indiens pour les exposer dans son cinq pièces côté jardin. BLUM, lui, ramasse les anciennes gloires passées (Shyamalan, Spike Lee) en leur donnant une nouvelle impulsion, expose puis coule ses poulains avec classe (Wadlow) dans des prods au budget cantine d'Avatar, remplume les artisans en perte de vitesse (Derrickson), le tout sous un air bienveillant de sauveteur du Septième Art et du genre horrifique en particulier. Une humilité et un sens des affaires qui doivent en énerver plus d'un. Oui, "BLUM" c'est un peu le bourgeois Bohème d'Hollywood. Un mec blindé qui te fait croire qu'il habite dans une cabane en torchis.


Nouvel associé dans sa quête de renouveau, Leigh Whannell ex-camarade d'écriture de James Wan, s'est lui aussi trouvé un job de réalisateur dans l'écurie en signant le vilain "Insidious 3" et le moyennement raté (ou réussi) c'est selon, "Upgrade", B-movie où surnage une poursuite en caisse montée sous valium et quelques trouvailles sympathoches. Avec deux tentatives foirées de bâtir un "DarkUniverse"(la dernière étant la plantade de Cruise sur "La Momie"), La Universal balance son giga concept à la décheterrie immédiatement repêché par un "BLUM" aux idées bouillonnantes. Chaque film passera donc au pressing avec un rétrécissement budgétaire pour un rendement maximal. La machine à frissons nullement impressionnée se met aujourd'hui à peloter le roman de HG WELLES avec la ferme intention d'en tirer fortune et gloire. Dur pour Whannell de passer derrière l'Alpha version de 1933 de James Whale ou les itérations plus récentes confectionnées par les petits doigts gracieux de Carpenter ou Verhoeven.


Cependant le troisième essai de l'ex coéquipier de Wan va s'avérer plus excitant tirant littéralement son matériau vers le haut. Les vertus de Invisible man ne résident pas dans sa thématique dans l'air du temps à savoir la violence faite aux femmes, onanisme sociétal dont les journalistes aiment se rouler à chaque fois que l'occasion se présente. On imagine bien Blum n'en avoir rien à cirer de ce type de propos du moment que les deniers emplissent sa besace. Non, ce qui anime le dernier né de l'usine à cauchemars, c'est bien sa volonté de redonner sa force au cinéma comme art de l'illusion en lieu et place de l'écran vert de 10 mètres par 3. A l'instar "des modernes" de Jeff Nichols à Shyamalan, Whannell fait totalement confiance au pouvoir du contre champ. Filmer l'espace vide et laisser à l'audience le soin de fantasmer une silhouette transparente. La forme n'est pas si éloignée des Séries B de Val Lewton et de Jacques Tourneur avec son économie de moyen et sa touch si personnelle dans le choix de la photographie et du décors. Un coup d'œil suffit à restituer le contexte et chaque axe de caméra renseigne le spectateur sur la nature ou la fonction de ses personnages. On retiendra ainsi l'étonnante gémellité de Griffin avec sa demeure, sorte de cube translucide High tech balayé par une mer déchaînée (difficile de faire plus explicite) et le pavillon type Middle class ricaine parfaite incarnation du rang sociale de Cecilia. Enfin contre-pied de la blonde Hitchcockienne, Elisabeth Moss se donne sans sourciller avec ce visage ovale si particulier loin des canons de beauté habituel. Une raison supplémentaire d'apprécier cette oeuvre straight qui ne s'embarrasse d'aucune circonvolution d'écriture.


Produit calibré, parfaitement pensé par un réalisateur souhaitant revenir aux origines de son art, "Invisible man" bâtit avec patience sa (petite) réussite avec un amour non dissimulé du spectacle qui se mérite. On peut lui reprocher de livrer un projet clefs en mains mais on ne doutera certainement pas de sa foi pour le genre.

Star-Lord09
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le 23 févr. 2020

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