Absolument personne ne vole de taxis.

Irréversible pose à mon sens une question fondamentale ; que recoupe l'appellation "film coup de poing" ? Peut-être faut il d'abord une mise en scène novatrice qui n'ait pas peur d'être expérimentale. Mais cet élément ne doit jamais reculer devant un jeu d'acteur irréprochable, et une certaine transfiguration de la réalité pour toucher le spectateur. S'il n'est pas nécessairement réaliste, le film coup de poing doit permettre la compréhension des émotions, du sujet retranscrit.


Requiem for a dream, dans sa représentation de la descente aux enfers, en est l'exemple le plus frappant. Ce n'est pas vraiment le cas d'Irréversible.


Il serait mentir de dire que le film n'est pas captivant, haletant, dérangeant et même dégoutant. Il se dévore sans que les yeux ne songent à décoller de l'écran.
Fondamentalement, le film de Noé est fort, efficace. Le choix du reverse confère un excellent sens du rythme au film, et s'il serait dithyrambique de parler de renversement des codes de la narration (Memento est sorti en salle une paire d'année auparavant), l'immersion est garantie.
L'évolution (mal)heureuse des différentes scènes est percutante, se regarde avec une sorte de fascination malsaine.
Le choc est là.
C'est simple, mais ça marche. Ainsi, si l'expérience est intéressante, elle relève presque de l'arnaque.


Facile de tomber dans l'ultra-graphique, de pousser les traits sombres de la vie nocturne parisienne jusqu'à la caricature, et d'utiliser la caméra embarquée à tire-larigot pour donner la nausée au spectateur. Cet amas de procédés aussi divers que variés pour faire songer à un "grand moment de cinéma" trouve ses limites dans des dialogues d'une extrême pauvreté et un sur-jeu du trio d'acteur principal révoltant.
C'est à se demander si Cassel et Bellucci ont acquis leur notoriété pour autre chose que leur plastique et leur incarnation du couple sulfureux.
Ce qui est pénible avec Noé c'est que ce dernier veut balancer quelque chose de cru, dépeignant une quelconque "triste réalité" alors qu'il cumule les incohérences outrageantes.
Dans la vraie vie une femme ne conseille pas à une autre d'emprunter seule un passage souterrain, et personne ne tue quelqu'un en toute impunité dans une boîte de nuit, même gay et déviante.


Le sensas sans pincettes balancé à coups de scènes certes fortes mais agaçantes aurait pu s'effacer devant plus de finesse dans l'écriture des personnages. Ainsi le film, en plus d'être une expérience visuelle, aurait pu être une expérience visuelle concluante.

ldonkeyboy
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le 18 févr. 2021

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