Il faisait partie de cette vague de thrillers hollywoodiens vaguement érotiques sortis durant les années 90 que j’affectionnais tant quand j’étais adolescent, au même titre que d’autres se passionnaient pour La trilogie du samedi, j’imagine. Il était surtout l’un de ceux que je préférais, avec La main sur le berceau ou Color of night. Autant je sais que le premier, signé Curtis Hanson, est resté absolument génial, autant le second, j’ai bien des doutes. En tout cas, j’étais curieux de revoir JF et moins pour le plaisir de la retrouvaille que pour voir un film de Barbet Schroeder – donnée qui à l’époque m’échappait. De Schroeder et de cette même période il faudra que je revoie L’enjeu (avec Michael Keaton et premier DVD qu’on avait eu à la maison, si mes souvenirs sont bons) et Le poids du déshonneur (avec Meryl Streep, Liam Neeson & Edward Furlong), deux films que j’aimais bien aussi. Si cette période n’est sans doute pas la plus intéressante de sa carrière, il me semble qu’il fut un bon artisan du genre en ce temps-là.


 Dans ce genre, justement, le film fonctionne toujours bien, distillant trauma et tension crescendo avec une certaine dextérité, captant l’atmosphère imposante et lugubre de cet appartement post-haussmannien d’un ancien hôtel de l’Upper West Side avec un sens de l’espace percutant. Mais la réussite tient en grande partie grâce à son duo d’actrices au physique volontairement ressemblant : Bridget Fonda & Jennifer Jason Leigh sont si extra que le casting masculin qui gravite autour d’elles semble complètement amorphe. La mise en place est plutôt efficace à défaut d’être réellement brillante : Après une rupture douloureuse, Allie, conceptrice de mode, engage Hedy comme colocataire mais si cette dernière est d’abord agréable et attentive, elle va peu à peu devenir jalouse et envahissante, au point de s’approprier son identité, intercepter son courrier, s’acheter les mêmes vêtements puis copier sa coiffure, rousse et carrée. Ce n’est que le début d’un cauchemar vampirique qui aboutira dans une folie destructrice et meurtrière.
Ce qui pose problème c’est probablement le nombre de rebondissements, d’artifices scénaristiques, de virages grossiers. Le film ne lésine pas à ouvrir des tiroirs, tient d’abord bien l’équilibre puis le perd dans sa dernière demi-heure où il gagne en efficacité cruelle ce qu’il perd en crédibilité sulfureuse. C’est dommage, cette tension domestique aurait méritée plus de rigueur, de force de frappe : On sent qu’il a Vertigo en modèle mais il ne prend jamais le temps de creuser un sillon aussi vénéneux qu’Hitchcock : La scène où Allie suit Hedy dans la nuit, jusque dans ce club où elle découvre que sa coloc se fait passer pour elle, est aussi géniale et malaisante sur le papier que foirée et expédiée à l’écran. Malgré tout et si l’on passe outre les grossières invraisemblances (l’utilisation aléatoire du son propagé par les conduits d’aération, notamment) avec JF partagerait appartement, Schroeder montre qu’il maitrise son petit suspense, trouve quelques éclats notamment dans l’utilisation de cet immeuble monstrueux, ses entrailles, naviguant avec aisance dans les couloirs, son ascenseur, sa cave. Bref, ça se regarde encore très bien.
JanosValuska
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le 2 déc. 2019

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JanosValuska

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