« Ah putain, encore un blockbuster à la con avec Samuel L. Jackson. Comme d’hab’ il va surjouer le type mi-cool, mi-vénère, et se trainer une dégaine qui ressemble à rien. » Voici, en résumé, ce que j’ai répondu quand on m’a conseillé de regarder Kingsman. Ça n’a pas loupé avec la bande-annonce : il braille plus fort que jamais, porte des lunettes rondes et une casquette de travers, et le film nous refait le coup du merdeux qui se découvre un destin exceptionnel – faudrait créer une « taxe Joseph Campbell » pour qu’ils nous lâchent avec ce schéma. Malgré ça, les critiques spectateurs étaient très positives, côté presse aussi – même chez Télérama, c’est pour dire -, alors je veux bien perdre deux heures de ma vie devant Kingsman.
Le moins que l’on puisse dire, c’est que j’ai été agréablement surpris par cet énième comics adapté sur grand écran.
D’abord parce qu’il fait se rencontrer deux caricatures tenaces sur l’Angleterre – un prolétariat post-industriel, rongé par l’alcool et le chômage, et une aristocratie figée dans les traditions ancestrales – et que la collision ne se produit pas à coup de punchlines, comme dans tout blockbuster habituel, mais grâce à un humour typiquement anglais, pince-sans-rire et absurde.
Ensuite par l’utilisation d’une violence stylisée et jubilatoire, dont l’omniprésence et l’intensité ne sont pas sans rappeler celle de Kickass, du même réalisateur. La démonstration va ici encore plus loin, notamment avec la scène de baston dans l’église, qui n’a rien à envier aux productions dites « sérieuses » de films d’action. On adore ou on déteste, tant pis pour les âmes sensibles et les esprits chagrins.
Enfin, le succès de Kingsman provient sans doute de l’ambiance ironique et décontractée qui s’en dégage : la musique accompagne parfaitement chaque scène, la cool attitude de l’apprenti espion n’a rien à envier à celle de James Bond, le second degré permanent dynamite toute progression du récit – mea culpa, Joseph Campbell n’était donc qu’un prétexte.
Et, puisque vous m’attendez au tournant concernant Samuel L. Jackson, son surjeu et sa dégaine sont parfaitement justifiés dans le film, ce qui est suffisamment rare pour être souligné. Maintenant, à vous de découvrir pourquoi…