Kung-Fu Master
5.9
Kung-Fu Master

Film de Agnès Varda (1988)

Voir le film

Ne pas sublimer la niaiserie mais la mettre à nu

Deux archétypes : la première, Jane, une mère qui s'accroche à sa jeunesse quitte à s'enfoncer dans l'archétype djeuns. La deuxième, Julien, un gosse qui se donne un genre devant ses potes et n'a d'yeux que pour les jeux vidéos.


Le film peut paraître mauvais en raison de son faux rythme et de ses dialogues niais. Mais je crois que Varda fait le double tour de force de 1) montrer la collision entre ces deux mondes, similaires par leur vanité, mais diamétralement opposés par leur écart d'âge et 2) porter un regard affectif plus que moralisateur.


La niaiserie filmée à nu, et non sublimée ou condamnée semble rare au cinéma mais est pourtant partout autour de nous : le tonton gênant, le/la collègue reloue trop bon public, le camarade de classe qui veut bien se faire voir…


Tout au long du film, Jane s'engouffre, Jane fuit, Jane récite ses inepties que l'on ne va jamais croire, Jane fait mine de ne pas voir le tabou en face de ses yeux, Jane fait mine de ne pas voir qu'elle a brisé le tabou […]

après la scène des baisers, entre autres

Jane se dit qu'il ne faut plus le voir, Jane l'invite quand même à Londres, à la fin la catastrophe.

Pourtant, Jane était sincère. Complètement irresponsable mais sincère. Absolument ridicule mais sincère. Sa fille (Charlotte Gainsbourg) et les autres adultes de son entourage lui frappent du sacre saint "remets toi en question" une fois le mal fait, mais Jane ne le voit pas de cet œil. Personne d'autre qu'elle ne le voit de cet œil tant Varda l'a confiné dans la niaiserie.

Non Jane ne se résoudra pas à enfin être une mère responsable. À l'inverse, Jane ne tombera pas dans la folie de faire sa vie avec Julien et définitivement se croire jeune fille à vie.

En fait Jane acceptera sa solitude sans prise de conscience de ce qu'elle a fait, et Julien redeviendra le garçon de cour de récré pour qui les meufs c'est les meufs et les jeux vidéo, y'a que ça de vrai.


Si au cinéma, une immense quantité de films montrent des personnages accomplis, mélancoliques, cathartiques, tragiques, enthousiastes, poétiques etc. Agnès Varda a fait le pari de nous montrer la niaiserie et le ridicule le plus ancré et bavard chez le personnage de Jane pendant 80 minutes et ça, c'est risqué.

AbdoulFalite
8
Écrit par

Créée

hier

Abdoul Falite

Écrit par

D'autres avis sur Kung-Fu Master

Kung-Fu Master
Moizi
3

Brigitte Macron, sa vie, son oeuvre

Encore une fois très déçu parce ce film d'Agnès Varda, écrit par Jane Birkin, avec Jane Birkin et ses filles... D'ailleurs j'ai appris que Lou Doillon était la fille de Jane Birkin... Le film est...

le 3 févr. 2018

16 j'aime

Kung-Fu Master
Boubakar
7

Une femme qui glisse amoureuse.

Pendant le tournage de Jane B. par Agnès V. cette dernière apprend que le succès de Sans toi ni loi va lui permettre gagner beaucoup d'argent. Au lieu de le garder pour elle, elle va interrompre le...

le 13 janv. 2020

5 j'aime

2

Kung-Fu Master
cadreum
7

La porosité de nos normes face à l'intime

Qui est le film ? Agnès Varda signe ici une fable narrative brève, centrée sur une relation transgressive entre une femme d’âge mûr et un adolescent. Le titre emprunté à un jeu vidéo semble annoncer...

le 24 sept. 2025

3 j'aime

Du même critique

L'Utilitarisme
AbdoulFalite
2

L'Intérêt ?

préambule : j'aimerais m'efforcer de contextualiser ma critique quand bien même l'on pourrait s'en foutre, mais ça permet de dissiper les possibles malentendus et objections qui pourraient m'être...

le 26 janv. 2025

1 j'aime

Harmonies économiques
AbdoulFalite
3

Il va falloir se mouiller la nuque…

Avant toute chose, cette critique va être volontairement longue pour expliquer la note, et expliquer l'intégralité de ma démarche histoire d'être complet et de dissiper des contre indications qui...

le 22 déc. 2024

1 j'aime

Kung-Fu Master
AbdoulFalite
8

Ne pas sublimer la niaiserie mais la mettre à nu

Deux archétypes : la première, Jane, une mère qui s'accroche à sa jeunesse quitte à s'enfoncer dans l'archétype djeuns. La deuxième, Julien, un gosse qui se donne un genre devant ses potes et n'a...