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Revoir Black Hawk Down en 2025 fait un peu mal. Non pas tant qu’il est vieilli, mais plutôt que mon regard a changé durant ces vingt dernières années, tant sur le monde que sur le médium, ou même sur le cinéma de Ridley Scott. Ma mémoire portait le film aux sommets du genre, mais la réalité m’a bien fait déchanter.
Coche toutes les cases clichées : fraternité des bidasses, glorification de violence, martyrisation pour le drapeau, incursion africaine par le filtres sursaturés de couleur chaude et la musique orientalisante (qu’importe que l’on lie Rachid Taha à la Somalie, tout ça c’est pareil)... Et pourtant, d’un point de vue spectacle, ça fonctionne bien.
Le cadre est exotique, le cast est d’une densité rare, mêlant stars futures et installées, seconds couteaux permanents et visages oubliés, et l’on se prend facilement dans la frénésie se muant en chaos alors que la débâcle américaine se déroule dans une unité de temps resserrée. Du moins, ça fonctionne un temps, car les longueurs et la répétition finissent par user car dépourvues d’un fond réel ou d’un angle de traitement original (outre cette vision d’une guerre moderne, quelque peu désuète en 2025 au vu des avancées technologiques).
L’imagerie guerrière et la représentation des théâtres de combats africain moderne véhiculées par Black Hawk Down ont marqué la culture populaire, donnant le cadre du jeu Resident Evil 5 qui va jusqu’à reproduire les mouvements de foule qui déshumanise l’ennemi par son aspect grouillant et anonyme, où servant de map multijoueur à la série Call of Duty. Un héritage bourrin donc. Il paraît ainsi difficile de dissocier l’esthétique du film de Ridley Scott d’une certaine jouissance ludique dans la violence. Un film nourrissant aisément l’assertion de François Truffaut selon laquelle “les films anti-guerre n’existent pas”, assertion à laquelle je ne souscris pas tant les contre exemple sont nombreux, mais qui trouve ici bien belle illustration.
Scott donne sans nuance sa vision Team America World Police. Peut-être y a-t-il une intention apolitique dans sa livraison d’une vision du terrain sans enjeux autres que la survie, mais cette intention échoue par la portée propagandiste qui fait des rangers des white saviors héroïques plutôt que de simples soldats en mission pour servir des intérêts économiques qui les dépasse.
Un fond bas du front, pour une forme qui malgré sa garantie spectaculaire subit tout de même la patine des années et affiche un certain kitsch stylistique. Black Hawk Down n’est donc pas mauvais, mais désespérément vide de substance, voire douteux selon les lunettes que l’on décide de porter. A prendre comme un film d’action manichéen assez bien troussé plutôt que comme un film de guerre conscient de son sujet.