Je m'enfuis pas... Je vole
La promo à outrance sur le mode "Courez-y" en accentuant sur le thème du handicap, c'est presque toujours mauvais signe. Presque. J'y allais pourtant à reculons, voir le mammifère cornu, surtout à l'heure de se remettre des agapes. J'avais peur que la surdité des personnages et le larmoyant soient trop mis en avant, pour extorquer la compassion et la sympathie du spectateur.
Première bonne surprise : une salle vide, pour nous tout seul alors que les lumières s'éteignent. Nous sourions. L'exploitant de mon cinéma beaucoup moins. Puis les premières images du film défilent, au rythme des Ting Tings. Témoigner d'un tel bon goût musical ne peut être qu'un point positif. AInsi les minutes, les péripéties se succèdent et je ne m'ennuie pas. Au contraire. Car La Famille Bélier est un petit miracle : en effet, aucun des ingrédients de sa recette n'éclipse les autres : tour à tour film musical, underdog story à la Rocky, jolie chronique des émois adolescents puis portrait d'une famille différente mais toute aussi unie, Eric lartigau jongle avec tous les aspects de son film dans le plus parfait des équilibres. Les comédiens ne sont pas en reste, Eric Elmosnino en tête puis, pas loin derrière, Louane Emera, véritable soleil. Autre personnage dont l'ombre plane sur l'oeuvre sans que jamais il ne surgisse à l'image : Michel Sardou, dont le répertoire est utilisé avec intelligence et délicatesse.
Ce beau film m'a enfin pris par surprise, au détour de la dernière scène musicale. Et retourné comme une crêpe. La gorge serrée, les yeux brûlants, la chanson se vit littéralement en un instant magique, presque irréel, soutenu par une voix et une conviction qui émeuvent.
A la fin du générique, les lumières rallumées, nous nous sommes regardés. Et à la question "C'était bien ? T'as pas eu envie de t'enfuir ?", j'ai répondu : "Je m'enfuis pas, je vole"...