Parler de politique

Je ne pense pas qu'Abdellatif Kechiche soit un immense réalisateur, mais avec Mektoub my love et La faute à Voltaire, il joue pour moi dans une catégorie à part au cinéma. Il est capable de faire des films qui pourraient durer des heures et des heures sans que je m'en plaigne, et celui-ci en fait donc partie.

Quel plaisir de suivre les péripéties de la vie de Jallel. Sa vie n'est pas simple, celle des gens qu'il va rencontrer non plus, ça se passe assez mal pour être honnête. Mais ces gens ont quelque chose de vrai, d'attachant et ça les rend "beaux", je ne sais pas trop comment l'expliquer mieux que ça. Et ce qui est super, c'est que comme dans la vraie vie, il y a des gens qui vont être importants et qui vont soudainement disparaitre. Je ne parle pas de la mort, mais de personnes qui prennent tout simplement des chemins différents.

Le personnage de Lucie m'a bouleversé, je n'ai jamais vu Elodie Bouchez jouer comme ça et je souhaite de tout mon cœur que les conditions de tournage étaient bonnes parce que ce n'est pas trop le genre de Kechiche. En tout cas, obtenir un tel résultat avec un acteur ou une actrice est tout simplement incroyable. Elle est affreusement vulnérable et en même temps très attachante, touchante en permanence. La voir sourire ou au contraire craintive me faisait fondre, elle arrive vraiment à créer ces moments très humains où on passe un peu vite d'une émotion à l'autre et où il y a un silence gênant entre deux personnes, sans pour autant qu'on en fasse une montagne. On ne tombe jamais dans le misérabilisme, alors qu'il y avait matière à ce qu'on saute à pieds joints dans ce ton-là.

Mon seul bémol finalement c'est un détail technique à la noix puisque les raccords lumière en extérieur ne sont pas toujours glorieux, là où je n'ai jamais particulièrement remarqué ça dans des films avant.

J'ai adoré voir ce film où la réalité qui entoure les personnages est dure mais où ces gens restent entiers : il y a des hauts et des bas mais il s'en dégage une beauté et une humanité suffisamment rares au cinéma pour être soulignées.