Elle est jeune, circule en rollers, et vit modestement avec sa mère, gardienne d'enfants, dans un pavillon en bordure du RER.
Mère et fille s'entendent bien, et la jeune femme n'a aucun problème pour s'installer avec son ami et vivre en couple "pour la première fois" comme elle se plaît naïvement à le dire.

Mais Louise, Catherine Deneuve, plus ou moins crédible d'ailleurs dans ce personnage de femme simple, a des ambitions pour sa fille Jeanne, Emilie Dequenne, fragile et attachante, et renoue avec un amour de jeunesse, Samuel Bleistein, Michel Blanc devenu pour l'occasion grand maître du barreau.

Tout d'abord heureuse, la jeune femme file le parfait amour avec Franck, Nicolas Duvauchelle plutôt convaincant en garçon déterminé et sincèrement épris, qui pour elle se laisse entraïner dans un invraisemblable trafic de drogue, et c'est là que tout bascule : Jeanne s'est-elle sentie abandonnée, moins aimée, inexistante dans sa petite vie étriquée, sans travail, a-t-elle été gagnée par la médiatisation à outrance de faits divers racistes, ou est-ce sa façon à elle, si soumise en apparence, de manifester sa rébellion ?
La réponse, c'est peut-être tout cela à la fois, et la gentille menteuse se transforme en dangereuse mythomane, qui va jusqu à s'infliger entailles et croix gammées pour faire croire à un attentat raciste sur sa personne.

Dans une société où le paraître est si important, où il faut exister par l'argent ou la réussite sociale pour être aimé(e), comment un esprit fragile et vulnérable n'en subirait-il pas les conséquences ?
Dans l'une des scènes les plus réussies, Jeanne dira d'ailleurs au jeune Nathan Bleistein, qui entretient avec elle une relation complice et pleine d'empathie : "Tu vois, je voulais qu'on m'aime, et c'est tout le contraire".

L'image que l'on donne aux autres, notre identité et le rôle du mensonge dans notre vie, voilà les questions essentielles que soulève ce film honnête servi par un casting prestigieux, dont la magnétique Ronit Elkabetz et Mathieu Demy , un couple juif qui compte dans cette histoire inspirée d'un fait réel.
Aurea
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le 5 févr. 2012

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le 13 sept. 2012

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Aurea

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