Mise en sommeil en 1975, la franchise La Planète des Singes revient sur les grands écrans en 2001 avec le Planet of the Apes de Tim Burton et financé par le studio 20th Century Fox. Bien qu'il soit un succès commercial, ce film est mal accueilli par les critiques de cinéma. Les producteurs préfèrent donc ne pas lui donner de suite.

En 2005, le scénariste Rick Jaffa tombe sur des articles de journaux parlant des comportements déviants de chimpanzés domestiques au sein de leur environnement humain. Les chimpanzés deviennent invariablement agressifs et attaquent soit leur propriétaire, soit une personne du voisinage. Ils sont ensuite retirés à leur propriétaire et finissent dans des refuges. Intrigué par le sujet, Rick Jaffa se met à parcourir plusieurs articles consacrés à la stimulation de l'intelligence chez les animaux par la génétique.

Trouvant là une idée intéressante, il rédige avec son épouse Amanda Silver une ébauche mettant en scène ces éléments dans l'univers de la saga de La Planète des Singes. Le couple arrive alors à rédiger un scénario prequel du Planet of the Apes de 1968 et le nomme CAESAR, en référence au héros des troisième et quatrième films de la saga. Caesar est en effet dans la saga le premier chef des singes et le premier singe à avoir dit « No ! » à un humain. L'idée principale du scénario est donc de reprendre cette situation pour montrer comment les singes s'émancipent des hommes ainsi que les circonstances qui entraînent Caesar à crier son fameux « No ! ».

Tout naturellement, le couple propose le scénario au détenteur des droits de la franchise, le studio 20th Century Fox, avec qui il avait déjà collaboré. Les cadres du studio sont très intéressés et Hutch Parker, le président de la Fox, donne son feu vert. Le studio demande ensuite au couple de scénaristes d'améliorer le scénario. Durant les quatre années suivantes, Rick Jaffa et Amanda Silver écrivent une trentaine de versions différentes. Confiant dans le projet, Hutch Parker va choisir l’un des scénarios qui traite de la relecture de Conquest of the Planet of the Apes et la montée en puissance de Caesar.

Le réalisateur et scénariste Scott Frank est alors engagé pour apporter ses idées et éventuellement assurer la mise en scène. Cependant ses propositions ne convainquent pas les cadres du studio. Scott Frank décide alors de quitter le projet.

Les producteurs engagent Rupert Wyatt pour réaliser le film pour un budget de 93.000.000$. Sa première décision va être de ne plus se servir d'interprètes maquillés, comme c'était le cas pour les autres productions de la franchise, pour représenter les singes.

CAESAR rebaptisé Rise of the Planet of the Apes n'est plus une prequel, mais un redémarrage de la saga, avec comme point de départ Conquest of the Plant of the Apes, et sort sur nos écrans de cinéma en 2011.

L'histoire suit un chimpanzé du nom de Caesar qui voit ses sens améliorés après que le chimiste Will Rodman a testé un médicament sur la mère du singe alors qu'il était un fœtus, un remède contre Alzheimer. Élevé par Will, Caesar comprend rapidement qu'il est différent et il tente de trouver sa place parmi les humains, puis auprès de ses congénères les singes.

Les scénaristes mettent en avant le thème de l'arrogance humaine vis-à-vis des autres espèces. Pour Rick Jaffa et Amanda Silver, il s'agit de la thématique principale du film. En effet, Steven Jacobs, le patron de Will, n'a aucune considération envers les singes, ni envers ses employés, ou même le bien de l'humanité. Lui ne voit dans les recherches de Will qu'un produit plus rentable que toutes ses productions réunies. Jacobs n'a pas d'éthique et n'a d'intérêt que pour l'argent. Que ce soit Will, Jacobs ou Franklin (un collègue), ils en subissent les conséquences.

Réussir à rendre crédible Caesar, le chimpanzé interprété par Andy Serkis, était un premier défi (ainsi que tous les autres singes). Ce dernier est relevé haut la main. De son enfance d'animal prodige, à la lente mais inexorable prise de conscience de cet animal se muant petit à petit en individu, jusqu'à sa révolte contre les hommes, le personnage existe bel et bien. Mieux encore, il nous émeut, par sa justesse, la finesse de ses réactions. Cette performance est le fruit des efforts conjugués d'un scénario très bien construit, du travail de Andy Serkis, et des troublants effets numériques réalisés par WETA Digital.

Le personnage de Caesar peut, sur plusieurs plans, être comparé aux êtres humains. D'une manière générale, et mis à part son apparence, Caesar semble même être humain, comme le prouvent ses actions. Dans sa scène finale, Caesar nous présente un dernier exemple de son humanité en déclarant à Will : « Caesar est chez lui ». Tout en suggérant que Caesar ne fera plus partie du monde des humains, ses paroles représentent un autre aspect déterminant de ce que signifie être humain : être doué de la parole. Avec ce nouveau don, il n’y a plus beaucoup de choses que Caesar ne puisse faire comme les humains. Son développement est achevé. Tout au long du film, la manière dont Caesar est présenté a une forte influence sur la façon dont le public le perçoit, et cette perception lui est favorable. Son humanité plus que son animalité illumine le film. Le récit milite très peu pour les droits des animaux, il pose plutôt un regard neuf sur ce que signifie être humain.

Caesar n'aime pourtant pas la violence. Il incarne un révolutionnaire à la fois déchiré, déterminé, mais pourtant humain. Ainsi, Caesar choisit le camp de ses congénères contre les humains, sans pour autant oublier les liens sentimentaux qu’il a tissés avec trois de ces humains. Il rejoint les singes car il a un sentiment partagé d'oppression commune qui les mène à l'émancipation par la révolution.

Centre du récit, Caesar éclipse un James Franco au jeu léger et une Freida Pinto qui ne dépasse pas le stade de potiche ainsi que tous les autres membres du casting (même un Tom Felton aussi détestable que lorsqu’il jouait Drago Malefoy).

La force du film est de parvenir à mettre en exergue les dérives de la science tout en recomposant les fondations de la mythologie de la saga dans une ode à la liberté animale. Rupert Wyatt ne cherche pas l’esbroufe, il donne le temps nécessaire au récit de se développer, de prendre de l’ampleur, et qui, malgré quelques faiblesses, réussit à nous rallier du côté des singes avec brio, à comprendre et approuver leur rébellion.

Si l’amateur d’action doit se contenter de quelques séquences acrobatiques parsemées au long du film, ce nouvel épisode se conclue sur une des plus impressionnantes séquences de l’année, dans laquelle les singes affrontent les forces de police sur le Golden Gate Bridge de San Francisco. Cette scène épique est encore une démonstration de finesse d’écriture, car le combat, qui permet de découvrir les talents de stratège de Caesar, dignes d’un empereur romain, est aussi saisit comme une opportunité de surprendre : l’arme n’est pas utilisé pour tuer ici, mais simplement pour neutraliser. La clémence est l’apanage d’une intelligence supérieure, d’une espèce qui souhaite renouer avec ses racines et son cadre primitifs, de vivre dans son véritable foyer.

Le spectateur parvient à s’identifier durant cette révolte parce qu’avant de la lancer, cette révolte est sans cesse repoussée, laissant le temps au réalisateur d’aller au bout de son histoire et de ses possibilités. C’est à la fois la force du film (parvenir à conter une histoire) et sa limite (le film ne s’échappe guère de la ligne droite qu’il se dicte). Quoi qu’il en soit, quand la fameuse révolte arrive enfin, monstrueuse et brutale, exemplaire dans sa mise en scène et sa gestion de l’espace, il ne reste plus qu’à constater l’effarante supériorité des singes sur l’homme.

StevenBen
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le 23 mai 2024

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Steven Benard

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