La première partie de la ruée vers l'ouest est très prenante. La course effrénée pour un bout de territoire est tout simplement anthologique. Dans la première heure se dessine un très bon western, brassant pas mal de thèmes récurrents : le racisme envers les indiens y est comparé à l'antisémitisme, une ville champignon sort de terre, il y a de la camaraderie et des conflits initiés par des fiers-à-bras, on y parle de liberté de la presse quand la loi fait défaut... Bref, Anthony Mann brasse large.
Malheureusement, la deuxième partie est très longue et, je trouve, peu convaincante. Le western au rythme trépidant se transforme en grande fresque, reprenant plus ou moins les thèmes de Géant. Le film est d'ailleurs tiré d'un roman de la même auteure, dont je n'ai rien lu, je me contenterai donc de le mentionner. C'est ambitieux, mais guère réussi. C'est qu'Anthony Mann, dans sa volonté de tout montrer, réduit les événements à une simple vignette, faisant de sa fresque une simple énumération. Politique, argent du pétrole, corruption, collusion, première guerre mondiale, tout y passe. On y retrouve, réduite à une scène et hors-champ, l'histoire des indiens osage, dont Scorcese tirera bien plus tard un très long et très beau film, le récent Killer of the flower moon.
Mais ce qui surtout ne fonctionne pas, c'est que le héros étant absent d'une bonne partie du film, on suit l'héroïne, interprétée par Maria Schell. Maria Schell est une actrice très sympathique, facilement émouvante, mais là, son rôle n'est pas intéressant. Elle y joue une femme venue de la haute bourgeoisie, et qui a donc du mal à s'adapter aux conditions de l'Oklahoma nouvellement colonisé, qui a entendu des horreurs sur les indiens et ne comprend pas que son mari les défende. Soit. Seulement, doit-elle, constamment ou presque, tenter de freiner les aspirations idéalistes de son mari sous prétexte de sécurité et de confort matériel? Trop visiblement est-elle réduite au rôle de faire-valoir de l'homme, c'est un cas d'école tellement c'est lourdement appuyé, et c'est encore plus visible et fatiguant lorsqu'elle se retrouve seule. Je ne pouvais m'empêcher de penser au documentaire Sois belle et tais-toi, de Delphine Seyrig, tant on retrouve ici les travers qui y sont dénoncés.
La ruée vers l'ouest est donc, en ce qui me concerne une déception. Le voyant sans avoir rien lu dessus, sans en avoir même entendu parler, je me retrouve de prime abord devant un excellent western, comment alors ne pas être déçu par cette seconde partie? Malgré tout, pour sa première heure, il vaut largement la peine d'être vu.