Marlène double.

Billy Wilder tenait La Scandaleuse de Berlin pour l'un de ses films préférés, sans doute à cause du tournage, partiellement effectué en Allemagne, dans un Berlin encore sous les décombres, mais aussi pour le jeu de ses acteurs.
Car l'histoire est celle d'une députée, venue d'Amérique pour constater si le comportement des soldats américains sur Berlin reste décent. Elle ne va pas être déçu du voyage, ceux-ci fricotant avec de jeunes allemandes, font du marché noir, et elle va s'intéresser en particulier à un colonel, joué par John Lund, qu'on soupçonne d'avoir comme compagne une femme, Marlène Dietrich, qui fut très active pour le Reich.

Ce qui frappe avant tout, ce sont ces toutes premières scènes, où on voit du ciel Berlin au lendemain de la guerre, qui est encore totalement rasée, avec quelques bâtiments restant encore debout ; cela fait penser à Allemagne année zéro, réalisé par Roberto Rossellini la même année. Mais de ce lieu tragique, Wilder en tire une comédie de quiproquos dont le moins que l'on puisse dire, est qu'elle est savoureuse. Le trio d'acteurs principaux, dont Jean Arthur, marche du feu de Dieu, on se reprend même à revoir la Marlène Dietrich de L'ange bleu quand elle se met à chanter dans des cabarets.
C'est souvent amusant, surtout dans la façon dont voit combien (la frigide ?) Jean Arthur se dévergonde peu à peu, se reprochant sans arrêt de tomber amoureuse d'un colonel, le très bon John Lund. D'ailleurs, leur première scène sentimentale, à base de tiroirs, est à ce titre un bonheur de mise en scène et de dialogues tout aussi percutants.

On peut sans doute reprocher sa longueur, deux heures, ainsi qu'une fin un peu trop moralisatrice, mais le fait est là : La scandaleuse de Berlin est du bonheur en barres, une des rares occasions de sourire après une telle tragédie.