Eternal Sunshine of the Spotless Heart

Les films de Frank Capra me bouleversent. Certains me trouveront sans doute trop sensible, mais à la fin, de chacun de ses films, je me retrouve toujours avec des larmes aux yeux, la gorge serrée par l'émotion et aussi le sourire aux lèvres, à hocher la tête en guise d'assentiment. Mais aucun ne parvient à me bouleverser autant que It's a Wonderfull Life.

Comment rester insensible à un film qui hurle à ce point son attachement à l'humanité, sa confiance totale et absolue en l'être humain, en dépit de tout, et peut-être même des faits et du bon sens, en dépit de la tristesse et de la douleur, en dépit de la trahison permanente et renouvelée par les hommes, partout et tout le temps, de tous les sentiments et de toutes les valeurs que véhiculent ce film, au point que ça en devienne douloureux.

Et pourtant, après It's a Wonderfull Life, j'ai toujours envie de croire un peu plus en nous, de croire un peu plus en moi.

De croire ce film qui nous dit que nous sommes meilleurs que nous le croyons, que nous ne sommes pas des échecs, que notre simple existence, aussi dénuée de sens nous semble-t-elle à une importance que nous ne pouvons mesurer.

De croire que l'influence que nous exerçons sur tous ceux qui nous entourent est capitale et peut faire la différence entre Bedford Falls et Pottersville; entre l'utopie de George Bailey qui est peut être, sans doute même, naïve, crédule, voire du point de vue de certains niaise et la dystopie de Henry Potter, que chacun de nos sens et de nos réflexions nous obligent à constater bien trop réelle, bien trop victorieuse.

De croire que les vies les plus simples ont autant de grandeur, si ce n'est parfois plus, que celles qu'on veut nous montrer en exemple comme on nous abreuvent de publicités mensongères pour que nous nous oubliions; tant que ces vies simples sont tournées vers des valeurs d'échange, d'entraide, et de courage face à ceux qui veulent dominer tout, pour qui s’accaparer les biens n'est pas encore suffisant et veulent en plus posséder le cœur, l'âme et jusqu'au rêves des hommes.

De croire qu'aucune des horribles choses qui peuvent arriver à quelqu'un dans sa vie ne doivent l'aveugler au point de penser qu'il n'a aucune importance ou qu'il n'est personne.

J'ai toujours vu le monde comme un grand billard. Sur ce billard des tas de vies telles des boules se percutent et s'entrechoquent dans ce qui est à la fois un immense chaos, et un ballet magique. Chaque vie est la résultante des chocs successifs de toutes ces boules qui sont venues changer la trajectoire de la notre et des leurs, au point que la somme de tous ces chocs, de toutes ces rencontres, de tout ce qui a influencé notre route, se perd dans la nuit des temps, et est impossible à prendre en compte. Au milieu de ce grand chaos, il y a les hommes comme Monsieur Potter qui pensent s'être faits seuls à coup de mérite, et les hommes comme George Bailey qui prennent conscience que nous devons à d'autres une grande partie de ce que nous sommes, et que chacune de nos vies, chacune des décisions, aussi minuscules soient-elles, qui nous permettent de légèrement dévier notre trajectoire pour toucher une autre boule, puis une autre, qui elles même en toucheront d'autres, encore et encore ,parfois avec une brièveté douloureuse, parfois sans même qu'on en ait conscience, feront changer le destin de tous à tout jamais et que par conséquent chacune de ces vies est importante.

Le film de Capra est destiné à réchauffer les cœurs, à donner de l'espoir.

Même durant sa création, il a aidé son acteur principal, le grand James Stewart à surmonter le chocs post-traumatique du à la secconde guerre mondiale et la dépression qui s'en est suivie. Je crois que ça se ressent dans le film et que ça ajoute encore une couche à son propos.

Le film de Capra est un film de Noël. Un film parfait pour cette période durant laquelle nous nous remettons tous à espérer le retour de la lumière, celle qui vient de l'intérieur, du fond de ce que nous sommes, alors que nous vivons au cœur des ténèbres.

On cherche tous à ce que le froid qui nous a saisi soit dissipé par le soleil invaincu d'une humanité et d'un espoir retrouvé, d'une chaleur humaine qu'on avait un peu oubliée, et qui est tout à coup ranimée, d'une joie de vivre et d'un amour pour les autres qu'on croyait dissipé, perdu et que cette étrange période durant laquelle les ténèbres refluent petit à petit face aux assauts d'un soleil qui ne s'avoue jamais vaincu depuis que l'homme arpente ce morceau de cailloux perdu, semble toujours parvenir à faire renaître.

C'est tout cela que le film de Capra m'inspire et qui tient en une phrase: l'espoir fou qui me pousse à croire que personne n'est inutile, que chaque personne a de la valeur, pour autant qu'elle se donne un peu la peine de la chercher en elle-même comme dans les autres.

Et puisque nous sommes proches de Noël, je ferai donc comme George Bailey, à courir au milieu des rues numériques de Senscritique, en vous hurlant que la vie est belle malgré tout, que personne n'est un raté s'il a des amis, ou même s'il a fait un jour de sa vie juste un peu de bien à quelqu'un, et en vous souhaitant, à toutes et à tous, un joyeux, vibrant et resplendissant Noël.

Samu-L
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le 18 déc. 2023

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Samu-L

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