Enfin le documentaire que j'attendais sur le thème du travail, des métiers pénibles majoritairement féminisés et l'autogestion !
Il y a quelques années, des femmes et des hommes sont parvenus à licencier leur patron pour prendre en main la gestion de leur entreprise de nettoyage et ce pendant plus d'une dizaine d'année. Ces employés devenus travailleurs autogérés ont fait le ménage dans l'établissement universitaire de l'UCL mais ont aussi géré la rémunération, l'organisation du travail et tous les enjeux qui y sont liés sans patron, ni actionnaire. Leur particularité a donc été de pouvoir s'autogérer. Cette situation est aujourd'hui (malheureusement) terminée, remplacée par un prestataire privé, cependant la réalisatrice à travers ce documentaire nous expose cette expérience avec des images d'archive et des témoignages, pour que nous en comprenions la logique et la réalité concrète. Rien que pour ça, chapeau !
Mais le documentaire ne s'arrête pas là, la méthode employée par la réalisatrice est remarquable, car grâce à des chassés croisés entre passé et présent, elle nous fait comparer la situation entre les travailleurs d'autrefois autogérés et les travailleurs actuels prestataires pressurisés. Les tables rondes organisées permettent des moments émouvants ainsi que des questionnements et des inquiétudes ouvertes de la part des travailleurs. Aussi, les images des travailleurs en action résonne avec les propos tenus pour comprendre leur implication concrète.
Le documentaire ne cherche pas à faire en soi l'apologie d'un système, il nous laisse assister à deux logiques contraires (capitaliste vs autogestion) et en comprendre les tenants et les aboutissants. On nous laisse réfléchir et ressentir, quelle réussite !
Tout est regroupé pour nous donner de la matière à penser, voici quelques pistes désordonnés qui témoignent de la richesse de ce documentaire :
- Le contraste de ces métiers invisibles / invisibilités avec les usagers des lieux (étudiants et professeurs) souvent méprisants ou ignorant de la réalité sociale du personnel.
- La question du rôle du représentant du personnel et du syndicat dans un monde qui apparait individualiste car tout est fait pour isoler le travailleur (physiquement et mentalement)
- L'hypocrisie du client (ici l'UCL) qui dissimule sa responsabilité derrière les régles juridiques d'appel d'offre pour ne pas se sentir concerné par les conditions des travailleurs
- L'argument fallacieux des innovations technologiques (aspirateur) pour justifier la réduction des coûts et l'augmentation des marges. Les fameux gains de productivités...
- Les joies, les étapes et les difficultés de l'autogestion pendant plusieurs années racontées par ceux qui l'ont vécue.
Bref, L'autogestion, une utopie ? non la preuve en est ! Une réalité possible bien qu'il ne s'agisse pas d'un monde paisible et parfait.