Remarquable reprise de ce classique du théâtre de boulevard

Le Canard à l’Orange mise en scène par Nicolas Briançon, c’est une pièce très rythmée, ironique et incisive portée par une brochette de comédiens interagissant dans un registre comique assez savoureux. Dans le rôle d’Hugh Preston, Briançon cabotine à mort et se permet des références trés franchouillardes ( dont le sketch de Pierre Dac et de Francis Blanche sur le voyant pas si extra-lucide). François Vincentelli, en John Brownlow, occupe très physiquement la scène et sa performance de « lapin à bretelles » aux mimiques extravagantes est tordante. Il n’y a pas de temps mort et les dialogues fusent dans ce huit-clos où mari, femme et amant et secrétaire se jaugent, se répondent du tac au tac et jouent à un jeu de chat et de souris ( où pointe l’inconvenance, la subversion et même l’amertume). Le trio de comédiennes n’est pas en reste dans cette partition endiablée. Anne Charrier, en apparence amante décomplexée imposant son nouvel amour au domicile conjugal, doit jouer le rôle le plus difficile de la pièce car Liz Preston se rend compte de la situation ubuesque dans laquelle elle se retrouve car John Brownlow s’avère peu compétent pour détecter les pièges tendus par son mari plus retors, cérébral et cultivé.Anne Charrier traduit avec brio l’inconstance de son personnage plus si sûr de ce ménage à quatre temporaire. Alice Dufour, en Patricia Forsyth, aidée par une plastique ravageuse, ne se contente pas de faire de la figuration et joue à merveille la fausse ingénue qui retrouve son pragmatisme inné pour filer à l’anglaise au dernier acte. Quand à Sophie Artur, elle est vraiment désopilante en Madame Gray, matronne voulant sécuriser sa patronne et son ménage alors qu’elle est au cœur d’un vaudeville dont elle n’a pas toutes les clefs. Vous passez deux heures à vous gondoler, à apprécier la mécanique de précision de l’ensemble et ne vous ennuyez pas une seule seconde. Ce n’était pas évident de remonter le Canard à l’Orange au vingt et unième siècle car le défi était de ne pas rendre la pièce dans un jus trop suranné et de passer après les illustres acteurs qui l’ont interprété. La bande à Briançon s’en est sorti à merveille, avec sa remarquable reprise de ce classique du théâtre de boulevard. Faites vous plaisir et n’hésitez pas à vous embarquer dans cette performance dramatique exceptionnelle.

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le 11 août 2022

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