« Le Shakespeare du cinéma » - Steven Spielberg

L’ouverture d’un film n’est jamais anodin de ce que le spectateur va développer comme premier ressenti et comme attentes à venir. En transition il n’est pas étonnant de découvrir de délicieuses anecdotes, comme celle de Polanski quittant un cinéma, la scène d’ouverture d’un film à peine terminée.


Ici, un générique noir aux battements de tambours et autres flûtes solennels, ouvrant sur un paysage brumeux telle une peinture onirique ne laisse que présager des dimensions certaines d’un potentiel esthétique….
Transposer du Shakespeare n’est pas surprenant chez un Kurosawa maître d’adaptions tout aussi prestigieuses qu’abouties. Son film suit d’ailleurs la ligne directrice de ses précédentes œuvres de par sa représentation temporelle, la beauté de son noir et blanc empreint d’inspirations puisées dans un expressionnisme modernisé ou d’un soin perfectionniste dans le travail des décors comme retranscription réaliste d’un japon féodal.


Le talent de Kurosawa n’est plus à démontrer lors de la sortie de cette œuvre. Lui-même n’avait rien de plus à prouver à la suite de tels films comme Rashōmon ou Les Sept Samouraïs. Et pourtant…


Si la possibilité d’un parallèle peut être établit avec un film à venir comme Yojimbo, autre récit de Samouraï empreint d’une codification propre au western, il est admirable de constater ici présent la recherche nouvelle d’une tonalité encore inexprimée; l’introduction d’une dimension fantastique comme base d’une quintessence visuelle.
Car Si le Château de l’Araignée fut une source d’inspiration pour Tarkovski c’est bel et bien parce qu’avec son film, Kurosawa réalise l’aboutissement d’une mise en forme comme poésie harmonique : la juxtaposition parfaite d’une science unique à définir le mouvement dans l’espace au service de la théâtralité de sa mise en scène, une maîtrise du cadrage et du découpage pour définir chaque plan comme un concept pictural, et du travail sonore d’une atmosphère onirique comme retranscription psychologique des victimes d’une tragédie auto-réalisatrice.


Si la postérité n’a pas gardé ce film dans les principales références du cinéma de Kurosawa, il s'agit à n'en point douter d'une de ses œuvres les plus singulières, d’une performance unique dans la réalisation d’un esthétisme comme langage cinématographique.

Wirn
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le 22 août 2018

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Wirn

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