Le Dernier Duel par Kroakkroqgar

"The Last Duel" mêle modernité et classicisme avec brio.

Ridley Scott est l'un des doyens de Hollywood et son savoir-faire n'est plus à démontrer : le film est une fresque de 2h30 bien rythmé, la mise en scène est impeccable avec décors et paysages très réalistes (malgré quelques châteaux en CGI), le casting est impeccable, la bande-originale de Harry Gregson-Williams est très réussies, et le film est clairement une référence au classique "Rashōmon".

Et pourtant, le récit traite d'une thématique tout à fait actuel : le viol. Le sujet n'est jamais anachronique, et Ridley Scott livre un compte-rendu très complet de la violence faite aux femmes grâce aux points de vue recoupés des différents personnages : le violeur interprétant le viol comme un jeu consentie, le mari colérique qui ne songe qu'à venger son honneur quitte à faire davantage souffrir sa femme, la désapprobation des pairs féminins, les idées reçues culpabilisant la victime. Ridley Scott parvient à afficher un ton plus éducatif que moralisateur mais son message est clair. Seul le passage féministe pendant lequel Margerite reprend en main le domaine manque de subtilité, mais l'intention est louable.

Seul l'écriture des personnages aurait mérité d'être plus soignée. Jean de Carrouges (interprété par Matt Damon) est présenté comme un homme bourrin et bourru mais fondamentalement bon, mais le film échoue à présenter la relation que Marguerite et lui entretienne. Difficile alors de comprendre ce qui les attache l'un à l'autre. Le personnage de Jacques le Gris (interprété par Adam Driver) est également assez difficile à cerner, et on n'a du mal à déterminer si c'est la loyauté et le romantisme qui anime le personnage, ou l'opportunisme et la lubricité ? Ce flou est assez déstabilisant, dans la mesure où les autres personnages sont beaucoup plus simplistes (Ben Affleck incarne un puissant riche détestable du début à la fin).