Nolan, c'est bien connu, choisit toujours des sujets où il a une grande marge de manœuvre, pour développer un scénario alambiqué, des personnages plus complexes à chaque fois, et son aisance à utiliser habilement les flash-backs dévoile toute l'étendu de son talent.


Le Prestige c'est en quelque sorte Nolan qui défini ce qu'est pour lui le cinéma : des mécanismes, des truquages pour parvenir aux tours qui n'ont rien de magique, c'est ce que cela provoque chez celui qui regarde qui relève du magique, de l'extraordinaire, belle métaphore de sa conception amoureuse du cinéma. Au delà de cette véritable déclaration d'amour au cinéma, Le Prestige est un grimoire de magie arcane où on ne sait plus qui des deux magiciens à l'avantage sur l'autre, tant leur duel s'engouffre dans des ténèbres de cruauté et de sacrifices. Un film fort, bien interprété, magistralement orchestré doté de plans absolument incroyable de mystique qui en font peut être à la différence des autres films du réalisateur un objet de mystère où tout semble à découvrir, Nolan se plait à exploiter les symboles magiques, d'en faire des objets sacrés et divinisés qui deviennent des icônes essentielles dans l'appréhension du spectateur, un équilibre précaire entre curiosité et peur, comme ce glaçant mais incroyablement intriguant cimetière de chapeaux.


Limitant autant que possible les explication des tours, pour ne pas altérer le plaisir de la magie peut être, mais surtout pour se concentrer sur ce que la magie a de plus passionnant, à savoir ses secrets, utilisés comme éléments d'intrigue et comme objets de convoitise et cause de la dégradation, de la déchéance même des deux magiciens, torturés par ce qu'il ne savent pas jusqu'en oublier ce qui est réel et finalement juste sous leur nez. S'il peut sembler alors dommage et maladroit de jouer sur le terrain de la science-fiction, cet écart est en fait essentiel car il ne sert qu'à rappeler la condition oubliée durant le film, " le magicien n'est pas un sorcier ", et le dénouement glacial s'il fait l'effet d'un tour alors révélé, prend tout son sens et remet en cause avec un fracas mémorable tout ce qui est plus grave que la magie : la réalité.

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le 20 juil. 2011

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Heisenberg

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