Le prestige. Au sens propre, et au figuré. Strictement, vous connaîtrez sa définition en regardant les premières minutes. Au figuré, il vous faudra plus de temps pour se rendre compte de la maîtrise du réalisateur. En d'autres termes, il joue sur le prestige du cinéma de nous mener en bateau. A la manière de Memento, il entremêle les scènes entre aller et retour, prolepses et analepses, comme il battrait les cartes avec une idée précise de son jeu et de ce qu'il cache dans sa manche.

Nolan joue sur un thème répandu dans la littérature – puisqu'il faut rappeler que le film est une adaptation de nouvelle - et le septième art : la rivalité. Néanmoins, il le traite avec l'originalité de son savoir-faire de cinéaste, mêlant thriller, fantastique, et drame. De la même manière, il ne se limite pas aux relations conflictuelles régies par des affaires sentimentales, mais se sert des apparences pour détourner l'objet et le but de ce conflit général, jusqu'à enfermer les personnages dans le monde de la chimère et de la virtualité, en bref du spectacle, qu'il soit « magie » ou « science pure ».

Le film s'achève malheureusement sur une résolution prévisible, mais qui a pour mérite de laisser une fenêtre entrouverte par le doute autour du tour qui nous est joué, et qui va donc au-delà d'une vérité illusoire qu'on veut bien nous vendre, à nous, demandeurs crédules. Aussi, et c'est bon signe, sa relative complexité structurelle en fait un film à revoir pour tenter de faire s'évanouir l'illusion à défaut de résoudre un mystère dont on connaît (ou du moins on se doute) l'aboutissant.

Double, la médaille comporte donc sa face brillante, mais aussi son revers. Il est vrai que l'on peut s'ennuyer face à des scènes, qui, remises dans l'ordre, peuvent perdre de leur éclat (Shutter Island, où es-tu ?). Ce à quoi je rétorquerais qu'il faut savoir saisir ce que le réalisateur suggère en filigrane à travers une lecture sur plusieurs plans qui se fait grandement à l'aide des personnalités ambivalentes et antagonistes des personnages. D'ailleurs, en plus d'interroger sur le spectacle et par conséquent l'art cinématographique, il est également moteur de réflexions personnelles sur l'être intime et l'être social, sur l'être et le paraître... même si dit comme ça cela peut paraître risible, justement.

Alors, Le Prestige, de l'or ou du plaqué ? Pour moi, c'est un tour de passe-passe réussi qui emploie les moyens cinématographiques à des fins époustouflantes. Mais après tout, qu'est-ce qu'on en a à faire de mon avis ? Tout le monde sait que la vérité est ailleurs...
Adrast
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le 15 août 2011

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