Scarifions les choses : un an après Titane, il est troublant de voir Les crimes du futur et ainsi comparer les visions "organiques" de Julia Ducournau et de David Cronenberg, tous les deux adeptes des films monstrueux. Le retour du maître canadien, dans un univers qui lui est familier, suscite l'intérêt de l’œil de par sa cohérence stylistique mais a du mal à se sortir de sa gangue conceptuelle qui se substitue à la construction d'un récit véritablement charpenté et fluide. Les scènes d'incision et de dissection ne semblent là que pour montrer que Cronenberg aime toujours explorer des zones sombres voire choquer les âmes sensibles mais n'ont sans doute pas le caractère subversif et malsain que pouvaient avoir certains passages de ses films de jeunesse. En un sens, le réalisateur est devenu un classique, y compris pour ses extravagances à la limite, comme s'il était tombé dans l'abdomen public. Ce qui est évident, c'est que la star d'un film de Cronenberg, c'est le cinéaste et personne d'autre, pas même lorsque le casting est comme ici alléchant. Viggo Mortensen assure évidemment en artiste avant-gardiste et "viscéral" mais on l'a vu meilleur en d'autres occasions. Même remarque pour Léa Seydoux, très neutre, et Kristen Stewart, peu présente. Au vu des premières minutes de ces Crimes du futur, très absorbantes, il y avait matière à espérer davantage, surtout de l'audace, d'un film qui brille plus par sa cérébralité que par son incarnation et ses vibrations émotionnelles.