« Les rêveurs » : premier film d'Isabelle Carré et adaptation cinématographique de son roman autobiographique. Isabelle carré, Elisabeth dans le film (Pourquoi avoir choisi un autre prénom puisque c'est son histoire revendiquée ? Peut-être cela manifeste-t-il sa volonté de préserver une certaine distance...) rencontre des adolescents hospitalisés, pour animer un groupe de parole et d'écriture. Elle se confie à eux en évoquant le fait qu'elle fut, comme eux, hospitalisée à l'adolescence. Suit le récit de ce qu'Elisabeth a traversé à l'âge de 14 ans : tentative de suicide, hospitalisation, résilience par la rencontre avec le théâtre qui permet de construire à partir de la sensibilité tout en la canalisant. La jeune Elisabeth vit dans une famille aimante, mais fragile ; l'adolescente hypersensible qui est dans un grand mal-être, plonge à la suite d'une déception amoureuse, laquelle n'est jamais qu'un déclencheur. Si c'est la jeune et formidable actrice qui est à l'écran pour y interpréter Elisabeth adolescente, Elisabeth adulte apparaît de temps en temps, nous rappelant ainsi qu'adulte, on garde en soi l'enfant et l'adolescent que l'on fut. C'est ainsi que lors d'une très courte et déchirante scène, Elisabeth adulte se substitue à Elisabeth adolescente, contenue fermement dans les bras d'un infirmier lors de la séparation d'avec ses parents. Le film dénonce le désœuvrement de ses jeunes hospitalisés dans les années 1980 et le fait que le soin était alors uniquement médicamenteux, mais aussi le fait qu'aujourd'hui, c'est le manque de moyens qui pénalise l'accompagnement thérapeutique. Le film est à la fois d'une grande sensibilité et d'une grande force. Mention spéciale pour sa dimension poétique qui se manifeste par son titre, mais aussi par les oiseaux d'un papier peint de chambre qui prennent leur envol, ou par la présence rassurante de la tour Montparnasse, phare dans la nuit parisienne depuis la fenêtre de la chambre d'hôpital. Excellent cinéma!