Lolita fait partie des films de Kubrick que je classerais dans la période médiane avec Spartacus (il n'y est que coréalisateur et avait récusé le scénario qu'il avait trouvé stupide), Les Sentiers de la Gloire et Docteur Folamour.Tous ces films sont remarquables, brillants, empreints d'une forte personnalité cinématographique et d'un oeil qui s'affirme.
Ne cherchez pas dans Lolita une adaptation fidèle du roman de Nabokov, à commencer par l'âge de l'actrice, Sue Lyon. Incarner à l'écran une protagoniste de 12 ans est tout simplement impossible pour toutes les raisons que vous imaginez.
L'adaptation n'en reste pas moins brillante. Encore quelques éléments perfectibles, certes (la séquence d'échange entre Peter Sellers et James Mason au début du film a un problème de rythme, par exemple) mais le film est globalement épatant, avec des audaces et des sous-entendus gonflés (l'hôtel oú Clare Quilty retrouve Humbert Humbert et Lolita, proposant ni plus ni moins une partie fine...), une fluidité experte du montage, des plans et des séquences proprement kubrickiennes (notamment la manière de filmer la représentation théâtrale shakespearienne).
Si la filmographie de Kubrick s'était arrêtée là, nous disposerions déjà d'un corpus significatif de films importants.
Lolita est une œuvre à apprécier pour elle-même mais aussi intéressante à visionner pour les pistes artistiques qu'elle ouvre et qui seront exploitées plus tard par le Maître.
Et qui peut rester insensible à l'incroyable séquence oú Humbert Humbert découvre Lolita allongée et prenant le soleil. Du grand art.